Homère et Rostand associés enfin au moins par les prénoms de leurs héros pour une comédie sentimentale que n’aurait pas renié Pagnol même si cet Ulysse et Cyrano se passe en Bourgogne. Un grand chef colérique qui a tout envoyé bouler va prendre un apprenti dans lequel il a décelé des talents rares de cuisinier. Histoire aussi de transmission, d’amour, d’affection paternelle signée par le tandem Xavier Dorison – Antoine Cristau servi par le très beau dessin de Stéphane Servain. Une balade chez les gens heureux ou qui le deviennent. Cela change du quotidien BD pseudo branché actuel bourré de drames et malheurs divers.
Flash-back, Gédéon Lecoq ravit la place de meilleur cuisinier de France à Cyrano avec son poulet aux écrevisses. Qui du coup met le feu à son auberge Les Trois lauriers et arrête tout. En 1952, quinze ans plus tard la famille Ducerf a certes de l’argent mais aussi un paternel Charles dans les ennuis. Ulysse le fils est censé prendre la relève alors que sa passion c’est la peinture. Ce qui chagrine aussi sa bimbo de mère anorexique. Ulysse a le bac dans deux mois d’où des cours privés à répétition. Mais les Ducerf ont un peu trop fabriqué de ciment pour les Allemands pendant la guerre et le passé les rattrape. Collabo et le gratin parisien qui renie les Ducerf obligés d’aller se mettre au vert en Bourgogne aux Maranges. Pas joyeuse l’ambiance même si il y a la jolie et brillante Marie qui aide sa mère à l’auberge du coin qui va alimenter les Ducerf. Ulysse tombe amoureux de Marie et après un petit accident est récupéré par un géant barbu et débonnaire, Cyrano qui lui prépare un encas de roi arrosé d’un Mercurey.
Ce sera évidemment le début d’une amitié sans faille et rapidement culinaire. Cyrano a du Raimu en lui, grand cœur bourru et va initier pour commencer Ulysse au mystère de la terrine qui va mettre la main à la pâte. Tout est savoureux dans cet album en grandes et superbes pages, beau format à couverture et dos toilés, une brochette de paroissiens attachants mais aussi un récit qui montre que la réussite peut avoir un prix. Pas le bonheur. Une parfaite progression narrative qui fleure la grande cuisine et la tendresse. In voluptate veritas, joyeux, des rebondissements et nouvelle cuisine en prime à l’époque. Quelques belles recettes en fin d’album.
Ulysse & Cyrano, Éditions Casterman, 34,90 €
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