C’est une affaire peu banale, à tiroirs, médiatisée à l’extrême et pas toujours selon les règles de la déontologie journalistique. Une succession de rebondissements, une justice qui veut avoir sa place dans le concert médiatique, une famille qui grosso modo se hait et Le Corbeau qui envoie lettres et passe des coups de téléphone d’une rare précision. L’Affaire Grégory Villemin c’est surtout la mort odieuse le 16 octobre 1984 d’un petit garçon de quatre ans que l’on a presque oublié dans ce combat monstrueux. Si on y ajoute le suicide en 2017 du juge Lambert, premier magistrat chargé de l’enquête on comprend que rien n’est vraiment clair ni défini, ni établi et que le ou les coupables courent toujours même si l’affaire en cette année 2024 n’est pas close faisant appel à des moyens scientifiques plus pointus qu’à l’époque. Béatrice Merdrignac (Disparus) et Tristan Houllemare au scénario et documentaires, Grégory Lê au dessin ont pris à bras le corps une affaire qui a mis en émoi toutes les salles de rédaction et une opinion publique qui attendait frustrée qu’on lui donne enfin un nom à se mettre sous la dent. BD et textes, encarts, historique, le travail que représente pour ses auteurs Le Corbeau est d’une rare précision. Rien n’est en fait suggéré, les faits avant tout, une somme mais qui n’a pas évidemment de réponse à apporter.
Un enfant a disparu à Lépanges-sur-Vologne. On le trouve dans le fleuve, mort. Commence alors l’affaire Grégory ce 16 octobre.Un corbeau s’est manifesté en téléphonant à l’oncle de Grégory. Il sévit depuis plusieurs années, depuis 1981. Grégory jouait devant chez lui, sa mère Christine repasse dans la maison. Elle sort à 17h20, Grégory a disparu. La suite on la connait. Revendication du crime par le corbeau, inculpation de Murielle Bolle 15 ans qui met en cause Bernard Laroche cousin du père de Grégory, Jean-Marie Villemin. Laroche est inculpé, remis en liberté en février 1985. Le 29 mars il est tué d’un coup de fusil par Jean-Marie. En juillet c’est la mère, Christine Villemin qui est inculpée, placée en détention provisoire. Elle sera libérée. On passe sur la suite, sur toutes ces années qui ne serviront à rien.
C’est finalement un cycle d’occasions manquées. Infos confidentielles données par la presse, un juge aux aguets dépassé par les évènements, la police et la gendarmerie qui se tirent dans les pattes. Un meurtre familial vraisemblablement car on a agrandit le cercle, ou un accident ? Pas de preuves, que des présomptions, des manquements dans l’enquête de départ, un labyrinthe finalement machiavélique pour un cold case. Des innocents on en a en pagaille et en 2024 l’enquête on l’a dit continue. Peut-être qu’il y a quelque part un indice, un témoignage qui pourrait rebattre les cartes de l’affaire Grégory Villemin. Allez savoir.
Le Corbeau, L’affaire Grégory Villemin, Éditions Petit à Petit, 19,90 €
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