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Le Dieu-Fauve, l’innocence anéantie

Histoire de jungle, de tribus, de singes, de vengeance dans un désert aride, Le Dieu-Fauve est un conte tragique, un drame assez Shakespearien avec ses héros aux destins sans retour. Comment le jeune singe Sans-Voix va-t-il devenir le Dieu Fauve et se transformer en tueur sans pitié ? Il serait intéressant de demander à Fabien Vehlmann d’où lui est venue cette idée de scénario à la fois très construit, philosophique et d’une rare force violence mais pas gratuite. Au dessin il y a Roger, oui Jazz Maynard dans un contexte où il a pris des risques assumés. Un trait vif, enlevé, alerte et d’un réalisme fulgurant, aussi rapide que ses personnages. Un album qui étonne, subjugue par les rapports entre justice, paix et finalement le totalitarisme, la désagrégation d’une civilisation.

Sans-Voix le singe suit le clan et a préparé une arme. Il est jeune mais fort, rapide, prêt à se battre avec Dos-Rouge mais Nouvelle-Mère s’interpose. Les singes se regroupent car il y a une proie en vue, un énorme crocodile blessé qui cherche un point d’eau. Il est aussi suivi par des hyènes. Mais il pénètre dans les terres interdites du bord du monde. Le clan le suit mais avant se repose dans les arbres où Sans-Voix peaufine son arme, une branche aiguisée. Le saurien semble mort et les singes passent à l’action. Erreur mortelle pour Dos-Rouge mais Sans-Voix, lui, trouve la faille et achève le monstre. Quand soudain il est capturé par des humains qui veulent en faire un combattant des arènes. Parmi eux, Athanael a une jeune disciple Awa. Dix ans plus tard Sans-Voix a été dressé, torturé par La Veneuse. Il est désormais le Dieu-Fauve. Mais un terrible tsunami va décimer la tribu hormis les dignitaires et Awa dont les tentes sont sur un sommet. Comment se réorganiser alors que l’empire a disparu. Comme le Dieu-Fauve dont la cage est vide.

Une petite troupe, traquée par Dieu-Fauve qui a enduré les pires souffrances et s’en souvient, des femmes et des hommes qui tuent, une longue marche, des récits dictés par quatre personnages qui racontent leur quotidien, un suspense car tout est possible. Fabien Vehlmann excelle. Le Dieu-Fauve est la menace qui plane et va déstabiliser les restes d’autorité et de cohésion des humains. De la tristesse, et quelle fin au bout du chemin ? On est à la fois bouleversé et bousculé. Un album puissant.

Le Dieu-Fauve, Dargaud, 21,50 €

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