Yuval Noah Harari est l’auteur d’une petite bombe à gros tirage, Sapiens, qui a fait le tour du monde et expliquait de façon claire, documentées, simple d’où nous venions, balayant parfois, si ce n’est souvent, des idées reçues. La naissance de l’humanité, c’est quand même un vaste programme. Le duo David Vandermeulen et l’excellent Daniel Casanave au crayon, se sont mis en tête d’en faire une BD dont le héros, certes est Sapiens, et le narrateur l’écrivain Harari. On aurait pu craindre le pire, l’ennui qui se serait introduit au fil des pages car le sujet est pour le moins sérieux. Que nenni car on plonge dans ce gros bouquin de 248 pages (épisode un, vous serez prévenu) comme dans un roman feuilletonesque avec ses héros, ses coups du sort, ses évolutions voire ses trahisons plus ou moins volontaires. L’adaptation n’était pas évidente. Vandermeulen, après Fritz Haber ou la direction de La petite Bédéthèque des Savoirs, aux Éditions du Lombard, Nerval l’inconsolé avec Casanave lui même maître en Histoire du Vin, avaient largement fait leurs preuves. Résultat Sapiens signé à plusieurs mains est une réussite à lire, conseiller ou offrir vu l’époque.
Les bases que posent Harari sont nettes. Physique, biologie, chimie sont nos origines. Enfin leur mise en commun. Pour l’être humain on repart il y a 2,5 millions d’années en Afrique de l’Est. Les espèces étaient nombreuses. De nos jours il n’y a en plus qu’une, homo sapiens. Sauf que homo Erectus, homo Luzonensis, Denisovensis, Floresiensis tout petit, Sapiens, à un moment donné, homo Sapiens a fait le ménage, façon de parler. Harari vous l’expliquera en détails avec l’aide de l’éminente Madame Saraswati reine de la classification. Espèce, famille, reproduction possible entre n’importe lequel des Sapiens qui appartiennent à celle des grands singes, on comprend alors que l’évolution n’est pas une mince affaire. Une sorte de Koh Lanta avant l’heure où il n’y aura qu’un seul gagnant avec oubli refoulé de nos origines. Gros cerveau, petits bras, Préhistorik Bill va découvrir que la pensée cela a un coup, qu’il faut du temps avant de ne plus prendre une rouste par un chimpanzé. En un mot, on est passé de la massue à la bombe atomique et ce n’est pas fini. Tout ça en se tenant debout, droit mais en mettant aux mondes des bébés incapables de survivre sans aide, contrairement aux animaux.
Ce n’est qu’un début. Théorie du remplacement, ou du métissage, Sapiens restera la seule espèce humaine. Super Sapiens, c’est nous. Le langage, nos ancêtres les chimpanzés, eux, ne sont pas des animaux sociaux comme le Sapiens capable ainsi du meilleur comme du pire dans le domaine. Roi de la fiction le Sapiens, tout est passé au crible, expliqué. On met les point sur les i, on illustre par des exemples, on parle de convaincre les autres mais pourquoi ? Le tour de force de cet album est d’impliquer, accrocher en parlant finalement d’un Sapiens capable de s’adapter, de progresser. Mais pour aller où et comment ? Le Sapiens agresse ses semblables. Alors quel avenir ? Un voyage dans un monde dont nous sommes les héros, qui par moment fait un peu froid dans le dos. A méditer tout en se distrayant, voilà le tour de force de cet album.
Sapiens, La Naissance de l’Humanité, Tome 1, Albin Michel, 22,90 €
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