Au moment même où ouragan et cyclone s’abattent sur les Antilles, voilà un album qui revient sur l’une des plus tragiques catastrophes naturelles qui a dévasté la Martinique et la ville de Saint-Pierre. Dans Cyparis la montagne Pelée et son volcan se réveillent au printemps 1902. Les alertes ne serviront à rien en cette période électorale cruciale. Et Louis-Auguste Cyparis, dans son cachot, va être aux premières loges. Un réquisitoire contre l’incapacité des hommes à redouter la nature et à nier les signes avant-coureurs, les messages qu’elle envoie. Lucas Vallerie a su avec beaucoup de passion, d’intelligence et de sens artistique retracer ces moments authentiques de feu et de mort qui auraient pu être partiellement évités.
Il est costaud et travailleur Cyparis mais quand il a abuse du rhum il est violent, machette en main. Il se retrouve au cachot en ce printemps 1902. Son destin va être intimement lié aux évènements qui se préparent en Martinique. C’est le paradis pour les visiteurs venus de la lointaine métropole. Une jeune et jolie jeune femme y débarque invitée par son oncle tandis qu’un voilier se prépare à y faire escale. L’équipage se réjouit de cette escapade terrestre. Cyparis lui tourne en rond dans son cachot. Saint-Pierre est surnommée la Venise des Caraïbes. Expédition en famille sur la montagne Pelée dont Saint-Pierre ne craint rien, protégée par le morne, un parapet naturel. Les élections se préparent et les politiques sont en transe alors que le volcan produits fumée et sons inquiétants. Quand le maire est prévenu il refuse de prendre des mesures.
On suit pas à pas les jours qui vont précéder la catastrophe et l’irresponsabilité d’après Lucas Vallerie des responsables. Cyparis sera sauvé par le cachot et deviendra une célébrité, un rescapé miraculeux au dos carbonisé. 28 000 morts en moins de deux minutes, Saint-Pierre rasé, le dossier qui clôture ce passionnant roman graphique est édifiant. Le dessin et les couleurs de Vallerie très ligne claire sont parfaits pour le sujet qui mêle joie de vivre mais aussi racisme à la détresse de cette population qui va disparaître. On s’attache à ce Cyparis héros malgré lui et on reste effaré par la bêtise des dirigeants.
Cyparis, Le prisonnier de Saint-Pierre, La Boite à bulles, 34 €
et Léon Compère, cordonnier. Il habite au pied du morne Abel. Sa maison n’a pas de vue directe sur le volcan, protégée qu’elle est par un repli du morne. Le 8 mai à 8h du matin, Compère est devant sa porte regardant la rade lorsque brusquement il ressent un vent violent venant du nord. Les arbres du jardin sont déracinés. Compère n’a que le temps de rentrer chez lui. Il s’aperçoit alors qu’il est brûlé aux mains, au visage et à la jambe gauche. L’obscurité se fait. Une grande quantité de cendres pénètre dans sa chambre et leur chute sur le toit en tôle fait un grand bruit. Compère, terrifié, se réfugie sous une table. Au bout de vingt minutes, l’obscurité cesse et Compère passe dans la chambre voisine puis passe dans la cour avant de se réfugier à nouveau dans sa chambre jusqu’au moment où la maison commence à flamber. Il se sauve alors par le boulevard. Compère se réfugie à Fond Saint-Denis d’où il est transporté à l’hôpital de Fort-de-France.
Il était initialement dans l’histoire, n’ayant pas réussi à trouver de lien avec d’autres personnages, je l’ai éludé mais le mentionne et figure dans l’annexe de la BD ainsi que sur le blog des Bonus BD dont l’adresse figure en fin d’ouvrage.
Léandre Compère ne s’est manifesté que bien des années après l’éruption ce qui fait qu’on ait accordé moins d’importance à son récit ! Mais son témoignage a été très utile à la rédaction de l’ouvrage d’Alfred Lacroix : Les éruptions de la Montagne Pelée.
Merci