Comme c’est curieux, comme c’est bizarre. Drôle d’idée de coloriser un des plus mythiques, si ce n’est le plus mythique des albums de BD, Tintin au pays des Soviets. C’est pourtant la décision prise par Fanny Rodwell, légataire universelle de l’œuvre d’Hergé, annoncée par les Éditions Casterman.
Pour être totalement objectif voici ce que dit le communiqué publié en commun par Moulinsart et Casterman qui « ont pris la décision de publier une édition en couleurs de la seule aventure de Tintin uniquement disponible à ce jour dans sa version noir et blanc : Tintin au pays des Soviets. Créée en 1929 et restée indisponible jusqu’en 1973, cette première grande histoire marque la naissance de Tintin. C’est avec un plaisir d’enfant, guidé par l’esprit du jeu et le désir de vitesse qu’Hergé s’adresse au lecteur dans cette course-poursuite où avions, voitures, trains, hors-bords et motos filent à toute allure. Si le dessin ne s’inscrit pas encore dans la perfection du style « ligne claire », le jeune auteur de 21 ans démontre déjà son habileté de romancier en images. Le sens dynamique du mouvement, la maîtrise de l’enchaînement des plans et la construction des pages expriment ce talent de raconter par l’image qui fera d’Hergé un grand maître de la bande dessinée. Le sujet grave commandé par l’abbé Wallez, patron du quotidien le xxe siècle, permet également à l’humoriste de se révéler visionnaire, à contretemps de son époque. »
D’accord, on veut bien. Tout ceci est charmant mais quel intérêt de toucher à une œuvre aussi forte en la maquillant ? Faire vendre comme un nouvel album la version couleur des Soviets ? Le communiqué enchaîne : « La mise en couleurs a été confiée, dans le cadre des Studios Hergé, à Michel Bareau, assisté de Nadège Rombaux. Cette colorisation amplifie la lisibilité du récit, la clarté des dessins et surprend par sa modernité, comme s’il s’agissait d’un nouvel album. Tintin sera de retour en librairie le 11 janvier 2017, au lendemain de son 88e anniversaire, et quelques mois avant les commémorations du centenaire de la révolution d’Octobre ». Ce dernier point est un argument de circonstance. Pour le reste on demande à voir en restant très circonspect sur la démarche et la clarté apportée. Bon, c’est vrai, on en a colonisé d’autres, films en tête, mais BD et surtout les Soviets, il fallait y penser et oser.
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