Jirō Taniguchi est décédé ce 11 février. Ce sont les éditions Casterman chez qui ce grand maître du 9e art était publié qui ont annoncé cette triste nouvelle. Jirō Taniguchi, l’auteur de Quartier Lointain, avait 69 ans. ligneclaire avait consacré une chronique à L’Art de Taniguchi dans lequel l’auteur se livrait et expliquait sa passion de dessiner.
De Quartier lointain, son plus grand succès en France, au western Sky Hawk, en passant par Le Gourmet solitaire ou encore L’Homme qui marche, Jirō Taniguchi est un maître incontesté de la bande dessinée mondiale. Véritable passeur entre le manga et la bande dessinée occidentale, il a bâti une œuvre dont la variété de tons et de genres est exceptionnelle. Autodidacte, Jirō Taniguchi fait son apprentissage en tant qu’assistant de dessinateurs confirmés, notamment auprès de Kazuo Kamimura, au contact duquel il découvre la bande dessinée occidentale, dont il s’éprend immédiatement. De cette influence, il retient la richesse des décors et la multiplicité d’informations contenue dans chaque case. De la grammaire visuelle du manga, il garde surtout la priorité accordée au mouvement.
Comme le fait remarquer le communiqué des éditions Casterman, il était le premier étonné de l’engouement suscité en France par son travail. Au moment de sa venue au festival international de la bande dessinée d’Angoulême en 2015, l’ensemble de ses titres publiés en français par Casterman s’étaient vendus à plus d’un million d’exemplaires. Jirō Taniguchi en concevait une joie et une fierté immenses sous le masque d’une grande pudeur. Mais plus encore que le prix du scénario récompensant Quartier lointain au festival international de la bande dessinée d’Angoulême en 2003, plus encore que la médaille de chevalier de l’ordre des Arts et des Lettres reçue en 2011, plus encore que les différentes adaptations en langue française de son œuvre hors du champ de la bande dessinée (cinéma, théâtre, télévision), ce sont sans doute les différentes expositions consacrées à son travail (Abbaye de Fontevraud en 2012, festival international de la bande dessinée d’Angoulême en 2015, Versailles en 2016) ainsi que les réactions de ses pairs (Mœbius, Mattotti, Bilal, entre autres) et des lecteurs qui le comblaient de reconnaissance.
Jirō Taniguchi était profondément bienveillant et doux. Si l’humanisme qui traverse toute son œuvre est familier de ses lecteurs, on connaît beaucoup moins l’homme, d’un naturel réservé et plus enclin à laisser ses récits parler à sa place. Le regard de Jirō Taniguchi s’illuminait dès lors que la conversation portait sur la bande dessinée. C’est l’un des rares sujets qui le voyait, lui d’ordinaire discret et peu prolixe, s’éveiller avec fougue et passion. Il aimait à témoigner de sa vive admiration à l’égard des auteurs occidentaux qu’il considérait comme des maîtres, et s’empressait de partager des anecdotes savoureuses sur les circonstances dans lesquelles il avait découvert leur travail. Il nourrissait également un intérêt profond pour les formes les plus récentes du neuvième art, toujours avide de voir où la bande dessinée allait, curieux de voir éclore de nouveaux talents.
De L’Homme qui marche (1995) aux Rêveries d’un gourmet solitaire (2016), les éditions Casterman ont tenu à préciser qu’elles sont honorées, fières et reconnaissantes de la confiance que Jirō Taniguchi leur a témoignée pendant plus de vingt ans.
Articles similaires