Un nouveau titre à mettre au crédit de Delirium. Grandville de Bryan Talbot est une uchronie policière étonnante, bien balancée sur fond d’anthropomorphisme bien que des humains plus ou moins esclaves subsistent dont la brave Bécassine et un clone groom de Spirou. Une enquête policière menée par l’inspecteur LeBrock de Scotland Yard, un blaireau avisé et son équipier Ratzi, petit rat efficace. Sherlock et Watson, Poirot et Hastings. Mais il faut savourer les clins d’œil que Talbot a éparpillé dans les pages, dessins ou dialogues, personnages, sans négliger que la perfide Albion en a pris plein Big Ben. Un vrai bijou ce premier tome.
L’Angleterre qui est finalement devenue indépendante alors qu’elle était sous tutelle de la France depuis son invasion par Napoléon au début du XIXe siècle, il y a près de 200 ans. Il avait fait décapiter la famille royale, Des évènements graves se passent à Paris et un meurtre a eu lieu près de Londres. L’inspecteur Lebrock supervise l’enquête qui n’est pas un suicide. Leigh-Otter qui vient de Paris a été tué alors qu’il tapait un rapport secret. Les meurtriers feraient partie de services secrets de l’empire français. Un pont relie l’île à la France dont la capitale est Grandville, ville lumière, Paris où on trouve des pâtes à pain, des chimpanzés glabres humains qui auraient évolué à Angoulême. De l’hôtel Marianne aux Folies Bergères, l’inspecteur et Ratzi commencent leur enquête qui tourne à une confrontation violente dans la loge de Sarah Blairow. La jeune femme ne va pas laisser LeBrock indifférent.
Il y a le graphisme, steam-punk très réaliste, soigné. Les pages explosent dans un univers art-déco et LeBrock, une force de la nature aidé par ses armes de poing dégage le territoire. Mais c’est aussi un limier astucieux qui déduit, comprend, anticipe. Il n’a pas d’états d’âme mais peut être sentimental. Le choix du physique des personnages ne doit rien au hasard. Il faut lire aussi la postface de Bryan Talbot et ses notes par page qui donnent des clés pas innocentes. Il y a du texte mais toujours utile, de superbes ambiances, une conspiration tordue à souhait, des politiques pourris, une révolution. Un feu d’artifice ce Grandville et on attend les autres avec impatiences. Indispensable ce qui est rare.
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