C’est le plus célèbre et le plus mortel adversaire de Sherlock Holmes. Le Professeur James Moriarty, dans l’inconscient littéraire des fans de Conan Doyle, est un homme d’un certain âge à rouflaquettes, haut de forme et redingote, pas un marrant, à l’âme aussi noire que du charbon. C’est le « Napoléon du crime » qui vaudra à Holmes, au moins provisoirement, de mourir à la suite d’un combat bien connu en hauts de chutes d’eau vertigineuses de Reichenbach. Personnage incontournable il n’apparait pourtant que dans six aventures de Sherlock Holmes. Le cinéma et la TV lui ont aussi donné un visage en particulier dans la très pertinente série anglaise Sherlock et sera même une femme dans la série US Elementary. Excellente famille, bonne éducation, petit génie en herbe, beau gosse, manipulateur, c’est à ses débuts qu’invitent dans un manga superbe et novateur Ryōsuke Takeuchi et Hikaru Miyoshi au dessin. Moriarty s’offre un relooking dans ce premier tome. Et se multiplie par trois. Quelle famille…
En cette fin du XIXe siècle, la révolution industrielle a encore plus accentué les différences de classes. La famille Moriarty a trois fils. Albert James l’ainé, William et Louis. Les deux derniers ont été adoptés et ne sont pas particulièrement aimé par leurs parents. Albert ne se fait aucune illusion sur son milieu et en renie l’organisation sociale pyramidale. Il veut la combattre. Albert se souvient comment ses frères orphelins ont été adoptés. Le plus jeune est malade et le plus âgé est doué pour les chiffres. Il a une mémoire étonnante. Albert commence à monter une entreprise machiavélique qui repose sur un principe simple : peux-t-on tuer par idéal ? Le manoir familial est incendié, les parents carbonisés. Le trio Moriarty passe une pacte infernal. Et au fil des ans monte une entreprise de conseils privés. On donne sa vie pour assouvir sa vengeance. Les Moriarty s’occupent de tout.
Fascinante cette vision de justiciers meurtriers donnée aux Moriarty. Un criminel qui défend les faibles et les maltraités mais à un prix mortel. Une montée en puissance sans états d’âme que les deux auteurs ont su réinventer avec les codes du manga. Moriarty devient un héros froid et pas unique. On se laisse prendre au jeu. D’autant plus peut-être quand on est un lecteur inconditionnel de Doyle. D’excellents débuts qui promettent pour la suite surtout si Sherlock y fait de la figuration.
Moriarty, Tome 1, Kana, 6,85 €
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