Suehiro Maruo est une référence en matière de manga. Deux titres qui rassemblent plusieurs de ses nouvelles viennent de sortir chez Casterman, Paraiso et L’Enfer en bouteille. Un retour en force et on ne peut pas dite que ce très célèbre auteur au trait parfait, soigné, fasse dans le léger. Il est pour les Japonais le maître du genre ero-guro, ou érotique-grotesque. Ce qui annonce la couleur et lui donne toute liberté pour en fait surtout traquer horreur, violence et désarroi dans une vie quotidienne où il n’y a pas de place pour la pitié, la bonté jamais récompensée. Reste qu’il y a un énorme talent chez Maruo que Moebius avait publié dans un numéro hors-série de A Suivre. Suehiro Maruo a obtenu le Prix Asie de la Critique ACBD 2021 pour Tomino la maudite.
Dans L’Enfer en bouteille, le ton est donné. Un frère et une sœur naufragés sur une île déserte grandissent, deviennent deux adolescents dont les pulsions vont leur poser un problème moral évident. Ils jettent des bouteille à la mer mais quel sera leur destin ? Idem pour un prêtre touché par la tentation de Saint-Antoine assailli de démons lubriques. Des gâteaux de riz au contenu bien curieux, le masseur aveugle en mourra et la nouvelle est pour le moins sanglante. Avec pauvre grande sœur on est touché, voire ému par un situation hors du commun, le dévouement ne paye pas. Un petit côté horrible et grand-guignolesque. Avec le second titre, Paraiso on retrouve un prêtre aux mœurs dépravés qui sera le fil rouge dans un Japon qui avait très mal accepté l’introduction du catholicisme. On aura par contre un autre prêtre qui sera le secours sans faille des déportés dans un camp de la mort nazi.
Très difficile de rester indifférent aux nouvelles de Suehiro Maruo. Il interpelle ses lecteurs, leur montre le pire d’un dessin doux qui cache en fait les démons qui vont bientôt apparaître. Il y a aussi un sens du récit très fort, macabre souvent où la mort se glisse dans l’intrigue. On parlera aussi d’ultra-réalisme, de subversion du manga comme l’a dit Moebius, d »humour noir. Maruo fascine et envoûte. Il mérite d’être découvert par ceux qui ne le connaissent pas encore. A ne pas mettre toutefois entre toutes les mains.
L’Enfer en bouteille, Casterman, 18 €
Paraiso, Casterman, 18 €
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