Thierry Smolderen au récit, Jorge González (La Flamme) au dessin ont allègrement mélangé Agatha Christie, Gaston Leroux, Arsène Lupin, une dose de fantastique qui brouille les pistes, une aventure historique où les faux rêves transfigurent la réalité. On plonge en se laissant couler à leurs suites, à celle du héros Richelin, à travers son énigme. Un univers mystérieux dont le trait sombre, réaliste et précis enduit le texte, le propulse vers les neurones du lecteur tout autant bouleversé par ces manigances que les héros de l’album.
Paris 1991, un meurtre inexpliqué, inexplicable, Corneille Richelin, vieil auteur de suspenses, est assassiné dans une pièce fermée de l’intérieur. Il a une hache préhistorique plantée dans le crâne. Mais quel lien avec cette rencontre de 1938 des maîtres du mystère organisée par la baron Von Richtenback ? Simenon, Steeman, Corneille Richelin est là lui aussi. Il a écrit semble-t-il Cauchemar en noir. Margery Allingham, reine du mystère à l’anglaise les rejoint. Richelin est le seul à être vêtu de clair. Margery dégomme Cauchemar en noir et découvre son auteur, Richelin. Mais le sujet est le rôle que veut jouer l’Allemagne en 1938 tout en découvrant que Richelin a écrit un nouveau livre, Cauchemar en gris. Tous sont chez Richelin où Von Richtenback déduit que le jeune homme descend des Atlantes. Margery s’éclipse et rejoint Mr Smith car elle travaille pour les renseignements anglais. Que va faire Hitler et que cherche Himmler ? Qui est l’inconnue qui veut se jeter dans la Seine ?
Les séquences vont s’enchainer sur fond de guerre. Margery passe en voix off. Surveiller Corneille, sa mission. Il s’est marié avec Fanny et prépare un film. Le tout flirte avec l’absurde, on passe du coq à l’âne, des sentiments du baron pour Corneille à son oncle qui dirige l’armement nazi. Mais on se laisse prendre au jeu, à l’extravagance du récit et évidemment au dessin de Jorge González qui est d’une réelle force, beauté froide. Pistes à suivre, Maurice Leblanc, rêves manipulés ceux de Corneille, truqués, piège à nazis. Thierry Smolderen a écrit (depuis son Mac Cay avec Bramanti qui reste un très grand moment ou L’Été Diabolik) une histoire dont l’originalité, la singularité donne envie de plonger à sa suite dans cette lente dérive onirique. Un album à clés.
Cauchemars Ex Machina, Dargaud, 25 €
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