Sir Alfred Hitchcock méritait bien qu’on se penche sur sa vie, son œuvre et sur sa carrière si atypique, british en diable, que les Yankees ne purent qu’admirer et envier. Pour parler d’Hitchcock, mais surtout le faire parler, se confier, il fallait un vrai spécialiste du cinéma. Noël Simsolo était tout désigné, réalisateur, comédien, historien, mémoire vive et pertinente du 7e Art. Avec lui son complice, le dessinateur Dominique Hé (Pornhollywood, Les Miroirs du crime). Et un invité de marque pour donner la réplique à Sir Alfred, son ami Cary Grant. On déguste ce premier tome d’une biographie à la fois précise mais aussi pleine d’humour, d’informations rassemblées dans un ouvrage qui se laisse déguster comme un film de l’éminent réalisateur de quelques-uns des chefs d’œuvre du cinéma. Dominique Hé a le trait qu’il fallait, clair et plein d’humour.
Cela reste, à titre personnel, la plus grande peur éprouvée devant un écran. Anthony Perkins dans Psychose, la scène de la douche, sont autant de traumatismes partagés par des millions d’innocents qui avaient fait confiance à Hitchcock pour les divertir et qui sont morts de trouille. C’est ainsi, en fait, que commence la biographie pour passer ensuite au tournage à Cannes de La Main au collet. Grace Kelly, Cary Grant sont là et c’est lui qui va pousser Hitchcock à la confidence. Son enfance de boulimique qu’il restera, on est au début du XXe siècle en Angleterre. Alfred reste seul avec ses parents. Il va chez les Jésuites, travaille et se tient à carreau. Tout en s’intéressant aux faits-divers les plus tordus qui défraient la chronique. La guerre arrive en 14, son père meurt de maladie, il suit des cours de dessin et va postuler dans une firme américaine qui a ouvert des studios de cinéma à Londres. Il est embauché pour dessiner comme graphiste les ornements des titres des films. Sans qu’il le sache, le cinéma ne le lâchera jamais plus.
Contrairement à ce qu’on peut croire au vu de ses succès, la vie d’Alfred Hitchcock ne sera pas simple. Il lui faudra du temps, beaucoup, des films nombreux sous tutelle, avant de devenir le plus connu, le mieux payé des cinéastes anglais. Il a commencé avec le muet, le parlant sera son cheval de Troie. Il deviendra, comme le montre Simsolo, le maître du suspense. Hitchcock avait du génie, des connaissances encyclopédiques, le sens de l’image, du cadrage, du jeu des acteurs pour une totale efficacité. On voit aussi que son sens de l’humour est très Monty Python avant la date. Ce premier tome s’arrête à son départ pendant la seconde guerre mondiale pour les USA. L’Homme de Londres voit s’ouvrir devant lui un univers qui dépasse tout ce dont il a pu rêver.
En jouant sur les dialogues, Cary Grant ouvre des pistes, Sir Alfred se livre mais en finesse, méfiant parfois. On découvre dans le détail un homme dont on retenu aussi la silhouette, la lippe, ses passages éclair dans ses films, et bien sûr ses titres à nuls autres pareils. Dominique Hé excelle. Les plus grands noms du cinéma d’avant 1940 revivent sous son crayon.
Alfred Hitchcock, Tome 1, L’Homme de Londres, Glénat, 25,50 €
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