Un numéro spécial incontournable. 100 dessins pour la liberté de la Presse sont signés en ce mois d’août par Sempé. Comme le dit dans son édito Christophe Deloire, secrétaire général de RSF, Sempé c’est le trait sans frontières. Sempé dessine juste, avec humour mais acéré, mine de rien témoin d’autant d’époques que sa longue carrière en a traversées. Sempé homme libre, ne pouvait qu’être le défenseur de ces confrères, de ces journalistes soumis à des pressions, des poursuites, des violences dans le monde entier, France comprise. Alors sourire avec Sempé, c’est aussi aspirer quelques bonnes bouffées d’oxygène, d’espoir, tout en restant bien conscient que tout ne va pas très bien dans notre monde.
Il parle de lui Sempé, franchement et on se délecte des mots qui deviennent parfois dessins. Un mélancolique, un doux-amer, il a commencé a dessiner pour la presse régionale. La France des trente glorieuses, celle du Petit Nicolas avec Goscinny, de l’emploi, de la non violence. La guerre en avait trop apportée et les Français s’en souvenaient. Pas comme aujourd’hui où la violence d’abrutis sans noms est devenue une réalité quotidienne. Il ouvre le bal avec un de ces banquets d’actionnaires où le discours sera bref. Et pour cause. Il faut toujours avoir l’œil aux aguets avec Sempé. Vive la foule et les grands meetings. Toujours concis et le dessin qui percute. On feuillette les pages de ces 100 dessins comme celles d’un bouquin, ami fidèle et maintes fois vues. On redécouvre le lion blessé toujours cruel, décalé, petit bonhomme sauvage. Une histoire, une vie en une page, c’est ça le grand mystère Sempé.
Un album qui fait date, qu’on déguste doucement avec une vraie joie, un réel bonheur. D’accord, il ne faut surtout pas oublier que ces 100 dessins parlent aussi du Mexique, de la Serbie, du Sénégal où les journalistes souffrent, meurent. Il faut aussi lire la carte du Tour du monde de la liberté de la presse. Il y a du rouge, beaucoup, du noir et même du marron aux USA. Le vert ne domine pas le monde pour la bonne santé des consœurs et confrères, leur liberté de penser et d’écrire, de filmer. Enfin, après 40 ans de PQR, comment ne pas se pencher avec intérêt sur le dossier consacré à la presse locale ? A-t-elle pu et su prendre à temps le tournant du numérique ? Le dossier est bien bâti, complet mais inquiétant, à moins que ce ne soit là aussi que l’évolution naturelle d’un média en mutation plus ou moins contrôlée.
Sempé, 100 dessins pour la liberté de la presse, Reporters sans Frontières, 9,90 €
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