Un bon choix par ses pairs pour un auteur certes atypique mais dont le talent en a toujours imposé par sa puissance et sa flamboyance. Après Art Spiegelman en 2011 et Bill Watterson en 2014, c’est l’auteur américain Richard Corben, qui est élu Grand Prix 2018 du Festival d’Angoulême. En compétition avec lui il y avait Emmanuel Guibert et Chris Ware.
Grâce aux éditions Delirium (et à leur travail de bénédictin) pour éditer ou rééditer des auteurs comme justement Corben, son nom certes très connu a repris sa part d’actualité pour un public plus récent. Né en 1940 à Anderson, dans le Missouri (États-Unis), Richard Corben commence à publier différentes histoires dans des magazines underground avant d’être engagé chez Warren Publishing, où il va devenir célèbre pour ses illustrations d’horreur et de science-fiction. Il est ainsi l’un des grands contributeurs de Eerie & Creepy, deux journaux devenus cultes qui ont véritablement révolutionné l’univers de l’horreur.
Le dessin de Richard Corben est très riche, pointu, marqué par son trait si reconnaissable. Maître d’une imagerie qui opère dans tous les « mauvais genres », il réalise des histoires d’horreur, de fantasy et de SF hallucinées et psychédéliques, souvent mêlées d’humour acide. Grand amateur d’expériences graphiques, dessinateur virtuose adulé par des professionnels de l’image venus de tous horizons, Corben sculpte (le mot est juste) avec un souci du détail étonnant des corps et des visages au paroxysme de leur expressivité, cernés par un répertoire d’animaux, de décors et de monstres chimériques et entêtants. Ses compositions sont le plus souvent modelées par une lumière irréelle, mais aussi par une mise en couleur explosive, au bord de la saturation, en dégradés longtemps exécutés à l’aérographe et devenus caractéristiques de l’auteur.
Corben est une figure à part de cette génération d’auteurs indépendants américains qui apparaît dans les années 1960-1970, et qui a inspiré de très nombreux auteurs. En France, l’auteur collabore dès le début des années 1970 au journal Actuel, avant de travailler à la fois pour Métal Hurlant et pour la version américaine du titre, Heavy Metal. Influencé par de grands auteurs de l’imaginaire, comme H. P. Lovecraft, Robert E. Howard ou Edgar Allan Poe, il publie notamment la saga Den, mais aussi Vic & Blood ou Mondes Mutants. Il collabore aujourd’hui avec de grands groupes d’édition, comme DC/Vertigo, Marvel ou Dark Horse, et on retrouve son trait inimitable au sommaire de Luke Cage, The Punisher, Hulk, Ragemoor ou encore Hellboy. Lauréat du Prix du dessinateur étranger à Angoulême dès la troisième édition du Festival, en 1976, Richard Corben a par ailleurs été récemment distingué par les comités de sélection du Festival (Esprits des morts & autres récits d’Edgar Allan Poe et le récent Ratgod publiés par Delirium).
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