Il parle en vers, de douze pieds. D’où son nom, Alexandrin. Un poète au cœur tendre, à fière allure, noble qui plus est mais sans un rond car de nos jours la poésie, on ne vous dit que ça. Pascal Rabaté et Kokor on tracé le destin de Alexandrin de Vanneville, qui slame sans le savoir comme ce brave Monsieur Jourdain qui, lui, avait préféré la prose. Un joli bouquet de fleurs au parfum surannée des vraies et douces choses de la vie.
Il va de porte en porte Alexandrin, déclame ses vers et propose ses poésies comme d’autres leurs encyclopédies. Enfin autrefois avant le web. Il se fait éconduire le grand dadais à figure de Don Quichotte. De la poésie de nos jours ? Mais on rêve. Il rencontre un jeune garçon, Kevin, en rupture familiale. Il le prend comme auxiliaire, lui enseigne quelques trucs pratiques. Mendicité appliquée et cours de rimes, trois sous en poche, ils vont faire bombance. Kevin a des économies mais on le recherche. Cartons pleins pour aller à la douche, un petit tour à la campagne et une belle rencontre qui va accueillir les deux vagabonds. L’étape pourrait être la dernière. Mais non. Kevin veut reprendre la route et chanter sous la pluie en mal aussi de famille sûrement recomposée.
« C’est mon phrasé normal. Comme ma vie ne rime à rien, je fais sonner les mots. C’est devenu primordial. » Telle est la devise d’Alexandrin. On se prend d’affection pour ce noble d’esprit qui ira au bout de son destin, de son inspiration qui finit par défaillir. On aurait aimé qu’il trouve le bonheur et la paix. Il l’approchera. Trop tard peut-être. Un philosophe Alexandrin, au nez pointu tel Cyrano que Rabaté, toujours aussi inspiré et talentueux, Alain Kokor au dessin (et non le contraire mélange coupable du rédacteur) , pour un voyage au fil des mots. Il faut ne pas hésiter en reprendre les phrases, les vers pour en savourer la finesse, l’humour mais aussi le désespoir. Un voyage initiatique qui fait chaud au cœur.
Alexandrin ou l’art de faire des vers à pied, Futuropolis, 22 €
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