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Interview : Ptiluc avec Hitler : « Hier déjà mais demain pourquoi pas ? »

Ptiluc est un de ces auteurs dont le talent caustique, la personnalité, l’humour sont autant de traits qui ont forgé son personnage. En signant au dessin, dans la collection La Véritable Histoire Vraie, un Hitler détonnant, il a surpris. Puis étonné et conquis car le ton graphique sur le scénario de Bernard Swysen est remarquable, plein d’idées. Tout est clair, vrai, émouvant, violent aussi. Rencontré à BD Plage Sète, Ptiluc y était venu avec Hitler. Enfin façon de parler, et il s’est confié à ligneclaire.info. En toute liberté comme d’habitude. Propos recueillis par Jean-Laurent TRUC.

Ptiluc. JLT ®

Ptiluc, comment en êtes-vous arrivé à Hitler ?

En deux mots ce n’est pas un projet à moi. C’est Bernard Swysen que je ne connaissais pas qui est venu me voir il y a trois ans dans un festival. Il m’a dit qu’il montait une collection pour Dupuis « Les Grands Méchants de l’Histoire ». Il m’a proposé d’y participer, lui étant le scénariste. Je ne savais pas le sujet et j’ai eu envie de dire non. J’ai réfléchi et le lendemain je lui ai dit que j’acceptais s’il me laissait prendre Hitler. Que j’avais déjà traité avec les Cochons. Je connaissais le sujet, j’avais lu des bouquins. Ce qu’il me proposait d’autre, Caligula, Dracula, non. Hitler, il avait envie de le faire. Les autres auteurs ne voulaient pas s’y risquer. Moi, c’est le seul qui me tentait.

Un sujet défi ?

Oui, parce que chez Dupuis ils ont mis longtemps à être emballé par mon travail. Il y avait tout le temps quelqu’un qui relevait un détail à corriger. J’ai fait beaucoup de pages d’essais. Le bouquin est sorti avec plus d’un an de retard à cause de ça. Mais une fois mis en route, plus de problèmes.

Quand on fait un bouquin pareil, on s’investit largement. Le sujet n’est pas neutre.

Quand il m’a parlé des Grands Méchants de l’Histoire, j’ai de suite pensé à Hitler. Quand il a été accepté, je lui ai demandé de me bloquer le Staline. Ce sont eux qui ont fait l’époque dans laquelle on vit. Sans eux tout serait différent. Notre siècle est issu de ça. Je voulais qu’on s’en souvienne, pas une simple biographie scolaire. Bernard Swysen a accepté que j’apporte des idées mais que tout soit vrai, vérifiable. Comme le fait que c’est Boss qui a fait l’uniforme noir des SS. On l’a dit mais il voulait que ce soit très daté.

Donc un respect total de la vérité historique ?

Oui, avec ce que j’apportais d’humoristique, certains détails dont il n’avait pas parlé. J’ai ajouté les deux narrateurs. Au départ quand j’ai vu les pages très écrites, didactiques du scénario, j’ai eu peur de ne pas y arriver.

Comment avez-vous fait alors ?

J’ai fait des pages d’essais avec immédiatement l’ours et le second narrateur. Le fait qu’ils soient Juifs n’est venu qu’après comme finir l’album avec eux. On a beaucoup échangé avec Bernard. J’ai aussi travaillé le personnage du SS Skorzeny qu’on connait mal, un personnage assez romanesque dans le mauvais camp. Il libère Mussolini, déguise des soldats Allemands en GI’s pendant la bataille des Ardennes. Il travaille après pour Nasser. Serait passé au Mossad israélien.

Les clins d’œil c’est vous ? Tintin, les Dalton, Disney détourné ?

Oui, Disney, Dingo, Tic et Tac, Pat Hibulaire mais tous ont été modifiés bien sûr. Disney l’a demandé. Au départ, non, c’étaient les vrais. Dans le débarquement de Normandie, il n’y avait que des Mickey avec des culottes rouges. Symboliquement, c’est la culture américaine qui débarque. Dans le Staline, je l’ai replacé. Glénat m’avait aussi demandé de faire un Mickey dans leur collection dédiée. Je voulais faire Mickey qui va chez le psy. Disney a refusé (rires). Faire des animaux habillés je n’avais pas fait ça avant.

Le Staline sortira quand ?

Pour Angoulême 2020 comme celui-là marche bien. Il pourra y avoir une relance.

On reprend toute la chronologie, origines, jeunesse d’Hitler, puis sa montée en puissance politique. C’est aussi expliquer naissance et prise du pouvoir par le nazisme ?

Ptiluc. JLT ®

Je ne suis pas le scénariste mais c’est ça. Plus une mise en parallèle avec ce qui se passe aujourd’hui. On n’est jamais à l’abri des extrémismes. Des dictatures plus perverses, c’est latent. Hier déjà mais demain pourquoi pas ?

Comment on fait coexister humour avec la tragédie ?

Le passage des camps, par exemple, est en noir et blanc. C’est mon idée. On en a fait un vrai chapitre, sans jeux de mots, pas de calembours. Il a accepté. J’en ai gardé qu’un de jeu de mots pour la Nuit des Longs Couteaux (NDLR Hitler se débarrasse par la force des Sections d’Assaut et de leur chef Röhm qui devenaient trop puissants, voir ci-dessus).

Tous les personnages sont historiques, Hess, Goebbels, Goering.

Les faire en animaux les rend déjà grotesques. Au départ je n’avais pas fait le choix de l’animalier. Cela s’est imposé ensuite. Staline sera un ours bien sûr. Je croyais qu’Hitler et Staline s’étaient rencontrés. Ce qui n’est pas le cas. Pour les camps il fallait que Maus soit présent. Noir et blanc et visuel.

Difficile cet album ?

Oui au début parce que je n’ai pas l’habitude de travailler sur le scénario de quelqu’un sans participer. Je l’appelais à chaque page. Pour le Staline, c’est plus simple. Plus débridé avec beaucoup d’attitudes.

Un album ensuite après adaptation que vous avez bien ressenti ?

Oui, je me suis coulé dedans avec un scénario bien construit où j’ai pu rajouter des séquences d’humour. Un travail intéressant. Une fois accepté, Dupuis nous a laissé libre. Avec des préfaces fortes. Moi ça m’a fait bizarre quand on dit que Ptiluc dédicace Hitler. Je me demandais ce qu’allait être ma fin de carrière. Voilà, on sait (rires).

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