Comme quoi, même en BD, il peut y avoir des actualités qui se télescopent. Prenons par exemple ce bien aimable Barbe Bleue, Gilles de Rais, grand amateur de petits enfants, copain de Jeanne la Pucelle dont il ne s’est jamais pardonné la mort. On connaissait le tome 4 de Jhen avec Pleyers puis son apparition dans d’autres albums de la série. Il vient de sortir chez Delcourt L’Homme de l’année 1440 qui lui est consacré et raconte sa chute. Ne voilà t-il pas que sort un autre Jhen consacré à qui ? Au Procès de Gilles de Rais. Ce qui est amusant, c’est de comparer les deux récits, leurs différences, les angles pris par les auteurs, le style, le dessin évidemment. Dans la version très intéressante de Pécau, il met en scène celui par qui périra Barbe Bleue, sorte de détective manipulé par ceux qui veulent à tout prix la peau de la Barbe Bleue. Avec Le Procès de Gilles de Rais, tome 17 de Jhen, par Néjib et Jean Pleyers dont on a toujours apprécie le travail minutieux, il ne faut pas oublier que Jhen et Gilles sont amis même si le héros connait par cœur ses travers mais est prêt à l’aider.
On le récupère pas très frais Gilles de Rais. De retour en son château il y a Jhen qui l’attend. Il sait que Gilles aurait commis l’irréparable, rentrer en armes dans une église et molester un prêtre. Il est ruiné et voulait reprendre son château de Saint-Étienne à Jean le Ferron, un prêtre qui en détenait les clés. Erreur car la justice de l’église a désormais un motif pour se pencher aussi sur ses crimes. L’évêque de Nantes est à la manœuvre. Une troupe arrive à Tiffauges pour arrêter Gilles et ses complices. Mais avant il demande à Jhen de retrouver pour lui une statue de la Vierge que son ami lui fait confiée. Il l’avait retrouvée puis confiée à un abbé. Il veut la récupérer pour qu’elle l’aide à faire face car elle recèle un mystère. Blanchet et Prelati, âmes damnées de Gilles sont aussi arrêtés pendant que Jhen se met en chasse. Le procès commence. Les charges sont lourdes dominées par des accusation de diableries, de pactes avec des démons. L’inquisition est de la partie. A l’abbaye où est la Vierge, Jhen s’est heurté à un refus.
Un mélange de grande histoire et de romanesque dans la tradition mise en place par Jacques Martin. Le procès est similaire à celui décrit par Pécau. Par contre on découvre la jeunesse de Gilles, son grand-père, Jean de Craon. Il finira par comprendre quel monstre est De Rais. Dès son adolescence, Gilles montre des signes inquiétants de violence. Une description assez subtile des raisons qui auraient pu pousser Gilles sur la voie du crime et du diable. On l’accusera d’avoir commercé avec lui, un acte encore plus grave pour l’époque que le meurtre sauvage d’enfants. On sait comment finit cette tragique histoire. Reste l’amitié sincère, lucide entre Jhen et Gilles qui en ont fait un des héros secondaires de la série. Un album classique et bien cadré par Néjib.
Jhen, Tome 17, Le procès de Gilles de Rais, Casterman, 11,95 €
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