Silas Corey édité chez Glénat a fini son escapade bavaroise. Il a accompli sa mission et retrouvé l’héritier Zarkoff. Pas simple et une aventure violente en milieu hostile, angoissante, au suspense peaufiné, où la graine du nazisme commence à pousser. Silas Corey, privé hors normes, cynique et revenu de tout, en est à son quatrième album. Fabien Nury, l’un des plus brillants scénaristes (Il était une fois en France, L’Or et le sang, La Mort de Staline, etc..) et Pierre Alary au dessin captivant (Moby Dick) ont façonné un personnage qui a confirmé sa place dans le palmarès des héros de BD. Pierre Alary était à Angoulême où il parle de Silas Corey, de son travail avec Fabien Nury, de ses projets et de ses envies. Propos recueillis par Jean-Laurent TRUC
Fabien Nury n’est pas à Angoulême, Pierre Alary. Comment travaillez-vous avec lui ?
Oui, il est très pris par sa série sur Canal. Pour Silas Corey, Fabien fait un pitch du scénario et me demande mon avis. Mais il aime travailler seul et de toute façon c’est lui la meilleure police. Il voit de suite ce qui ne va pas. C’est un vrai méticuleux. Il a dans sa tête les idées de raccord. Il sait articuler son scénario. Il faut avoir des arguments massue pour lui imposer quelque chose de différent. On a par contre pour le tome 1 du Testament Zarkoff revu le personnage féminin.
Quelles sont les autres étapes ?
Quand on travaille sur le premier board, on peut revenir sur pas mal de choses, le refaire plusieurs fois. On est allé jusqu’à quatre ou cinq story-boards. Et je travaille ensuite de façon traditionnelle. Fabien n’est pas envahissant. Il est précis, pas directif. Son travail c’est l’écriture. Après il passe la main. Il garde une vision très cinématographique. Il n’intervient jamais par exemple sur les couleurs. Il fait une confiance totale.
Ce tome 2 du Testament Zarkoof est plus violent, plus noir ?
On est dans un monde au creux de la vague, qui se reconstruit ou essaye juste après la Grande Guerre. En plus Silas Corey n’est pas sur son terrain. Il est à Munich. La révolution gronde en Allemagne. Il fallait que je donne une ambiance très sombre à cet environnement violent où Corey et Nina jouent leur vie face à des ennemis sans pitié. J’ai fait des recherches sur la brasserie où Hitler prononce son premier discours à Munich. Il y a pas mal de photos d’époque. Tout ce qui est dans l’album a existé dont ce fameux Ordre de Thulé, au départ association caritative mais en fait nazie qui voulait plus tard retrouver les origines aryennes des Allemands sur ordre d’Himmler.
On atteint un sommet dans l’action, dans les enjeux. Corey n’est pas loin du gouffre ?
Oui, On est au bord de la rupture. On atteint un paroxysme où la haine est largement présente. Corey rend coup pour coup. Page 31 de l’album on pense à Wolverine, le super-héros, dans mon dessin. Il va bondir et se venger. L’intrigue est classique mais il y a tout ce qu’il faut. Et à la dernière page, on comprend que Silas Corey sait de quoi l’avenir va être fait et que cela ne lui plait pas. Silas Corey est conscient du monde dans lequel il vit. Cela explique beaucoup de choses. Il doit vivre avec. Il aurait pu se rapprocher de Nina qui est un personnage intéressant. Par contre moi je ne m’attache pas aux personnages.
Après la Bavière et la neige, où allez-vous aller avec Corey et Nury ?
Disons que Silas ne sera pas dans le prochain diptyque un détective citadin. On va décrocher de l’Histoire. Toujours dans les années 20 mais dans une ambiance plus ensoleillée, plus moite, à la Bernard Prince. On retrouve le côté aventurier. Fabien écrit. Ce sera aussi un diptyque. Je ne peux pas en dire plus.
Vous avez d’autres pistes, projets, envies ?
Je travaille sur un autre projet plus lointain, Conan le Barbare scénarisé par Morvan. Dix nouvelles, dix équipes et dix albums, horizon 2017. J’aime le western et les pirates. On a les mêmes goûts avec Fabien. Pourquoi pas, mais ce sont des genres qui peuvent être rapidement saturés. Il y a des bouquins aussi que j’aimerais adapter en faisant scénario et dessin comme Crépuscules sanglants. Et pourquoi pas parler de la guerre du Vietnam ?
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