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Le Fils de l’Ursari, échec et mat

Un Ursari est un montreur d’ours, un Rom originaire de divers pays de l’Est. Et ce sont les héros du Fils de l’Ursari adapté du roman de Xavier-Laurent Petit par Cyrille Pomès au dessin et au scénario. Une superbe histoire pleine à la fois de drames et de joies, d’espoirs et de trahisons, d’hymne à la différence et au bonheur. Des Roms qui ont la bougeotte, dont le monde est la maison, mais aussi manipulés par des réseaux sans scrupules ni pitié. Victimes mais fiers et toujours combatifs. Une vraie découverte cet Ursari, qui emballe et séduit, charme et interpelle sur fond de partie d’échecs de génie.

Mica, c’est la voiture de la famille Zidar, du montreur d’ours. Ils sont prés d’un village roumain mais ne sont pas aimés par la population. Malgré une démonstration de combat contre leur ours, la brave Gaman, il y a quelques vols de trop. Les villageois mettent le feu à leur voiture et exigent qu’ils partent. Le lendemain de curieux visiteurs leur proposent des les conduire à Paris, vile qui croule sous l’argent parait-il. Un argent que la famille n’a pas mais accepte de s’endetter pour payer le passage, sans l’ours qu’il faut relâcher dans la forêt. Même la grand-mère, Mammada, préfère rester. Au bout du voyage, c’est un bidon-ville dans la banlieue parisienne et un abri de fortune pour la famille Zidar. Ils sont sous la coupe de Karolly, une ordure qui va les exploiter au nom de ceux qui ont payé leur passage. Lazar le père, M’man la mère, Véra la fille, Dimetriu le fils ainé, et enfin Ciprian le plus jeune, vont arpenter le métro ou autre ferraille, voler, pour rembourser leur dette à un taux usuraire. Un jour, par hasard, Ciprian arrive au « Lusquenbourg » où il voit un couple jouer avec des pions sur un échiquier. Désormais sa vie va changer. Tchéquématte devient son seul plaisir.

Que ce soit le contexte très crédible, la force du patriarche qui défend les siens, le talent de Ciprian, ses amis de rencontre, les méchants qui le sont encore plus qu’on ne croit, les rebondissements nombreux, on adhère à cette cavale finalement très actuelle. Précarité, immigration, chantage, expulsion, relogement précaire, certes on est par moment malgré tout plus dans le conte de fées que chez les Thénardier. Encore qu’il y ait des similitudes. Le Fils de l’Ursari a été primé en 2017 et reçu le Prix sorciers et SGDL Jeunesse. Le graphisme vaut lui-aussi largement le détour. Ciprian est émouvant et courageux. Il y a des scènes d’anthologie dont celle où le père découvre qu’il y a l’eau courante dans l’hôtel miteux où on les loge. Et on n’oublie pas le couteau de l’Ursari, rare, autour duquel tournera aussi l’histoire. Un bel ouvrage Jeunesse et pas que, bien au contraire.

Le Fils de l’Ursari, Rue de Sèvres, 14 €

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