Qui dit Barbe Bleue dit Jeanne la Pucelle mais aussi un épisode mémorable de Jhen, le tome 4, par Martin et Pleyers. Cette fois, si Gilles de Rais est à nouveau le héros de cet album de la collection l’Homme de l’année, Jean-Pierre Pécau a eu le trait de génie de raconter comment, pourquoi et qui a fait tomber, ou mieux, grimper au bûcher l’un des plus puissants personnages de l’époque. 1440, on a peur dans les campagnes, les enfançons disparaissent et une méchante mais belle sorcière, Dame Perrine, fait du racolage. Une vision plus politique que fait-divers, mise parfaitement en scène par Lajos Farkas au dessin appuyé par des couleurs très dans le ton de Jean-Paul Fernandez. Mais qui était vraiment Gilles de Rais et celui qui aurait causé sa perte ?
L’évêque de Nantes a demandé au pape un enquêteur qualifié car on disparait un peu trop dans son diocèse en cette année 1440. C’est le chevalier Gwen de l’Hôpital qui s’y colle. Un redoutable qui déjà, à son arrivée, tombe sur une curieuse jeune femme voilée par une étamine. A Nantes, on joue un Mystère, ancêtre des pièces de théâtre. C’est Gilles de Rais qui l’a commandité. Il a des ennemis, Gilles, mais prévenu par Gwen qui veut l’approcher, il trucide ceux qui lui ont tendu une embuscade au nom de Béatrice de Montjean que Gilles a spolié. Du coup Gwen se lie avec Gilles de Rais, ancien compagnon de guerre de Jeanne d’Arc et Maréchal de France. Gwen en réfère à l’évêque qui sait que le chasseur est du même monde que sa proie. Sans pour autant tout lui dire sur les raisons qui font de Barbe Bleue un risque pour des puissants. Gwen intègre la troupe de Gilles et rejoint avec lui son château de Tiffauges.
Tout est machiavélique dans cette histoire. Et ambigu au possible car Gwen sera le manipulé de service. Conscient ou pas ? Il faut se plonger dans cette enquête qui passe des culs de basse fosse aux salons de l’évêque et par le souvenir de Jeanne la Pucelle à qui Gilles de Rais a voué sa vie. Justice ou règlement de comptes ? Pécau joue la carte très élaborée et argumentée du gêneur politique et de la papauté, avant celle du tueur en série qui aurait dépassé les bornes. Le dessin réaliste est captivant, les personnages impressionnants dont la très perverse Dame Perrine. Une vraie synthèse pour un excellent album.
L’Homme de l’année 1440, Tome 15, L’Homme qui arrêta Barbe Bleue, Delcourt, 15,50 €
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