L’histoire d’une obsession, celle d’une inspectrice de police pour une jeune femme qui a disparu il y a plusieurs années, jamais retrouvée. Elle était chargée de l’enquête et elle est minée par cet échec. Impossible de clôturer les recherches. Par la forêt pourrait être un polar très noir. C’est en réalité est surtout une étude approfondie de la marginalité, de la solitude, des méthodes policières et de la déstabilisation de ses fonctionnaires confrontés à l’impensable, au coupable qui échappe et à l’absence de victime alors que tout montre qu’il y a eu meurtre. Anthony Pastor (No War) est le scénariste de cette balade sans retour parmi un monde qui renonce à la logique et qui détruit les plus faibles. Jean-Christophe Chauzy est au dessin et on ressent immédiatement la profondeur du trait, la richesse émotionnelle qu’il transmet dans ses pages, lui l’auteur parfait de Le Reste du Monde. Un album fort, dérangeant, ambigu aussi mais volontairement.
Elle court dans la forêt, on la traque, elle frisonne mais qui est-elle ? Dans les buissons un homme l’observe, écouteurs sur la tête. Quand le téléphone sonne, elle apprend qu’il faut qu’elle se rende sur un scène de crime. Elle est flic. Elle retrouve son coéquipier avec qui elle a eu une aventure et qui est très amoureux d’elle. Elle a décidé d’aller habiter en banlieue, près de la forêt, dans la maison même d’une joggeuse qui a disparu et qu’elle rage de ne pas avoir retrouvée. Est ce qu’elle s’est identifiée à cette femme dont la mère campe dans les bois toujours persuadée que sa fille est vivante malgré trois ans d’absence ?
Des témoins ou des ombres qui vivotent, des souvenirs qui reviennent et une voix qui sortirait des sous-bois, une femme obsédée et prête à tout quitte à forcer la vérité, et la forêt qui un personnage à part entière. On pourrait parler de schizophrénie, de féminisme, de fausse piste, de dérapage fatal pour plaire à l’autre, un tout qui flirte avec l’ambiguïté et l’émotion, bien mené. On y parle aussi d’anonymat humaine et de grande tristesse qu’une pointe d’espoir efface un peu. Un très beau travail graphique à larges cases de Chauzy.
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