Boris Vian, pseudo Vernon Sullivan, a marqué des générations de lecteurs. On sait que c’est surtout grâce à J’irai cracher sur vos tombes que Sullivan est arrivé jusqu’à nous. Pourtant Vian a récidivé comme on l’a déjà vu avec la collection que lui a consacré Glénat. Et on tuera tous les affreux est le dernier titre de Sullivan à être adapté en BD. On y découvre un registre toujours polar mais plus déjanté, un soupçon SF, un peu moins noir que dans Elles ne se rendent pas compte sorti plus tard ou que dans Les Morts ont tous la même peau. Vian aura signé quatre « Sullivan », des pastiches certes mais aux arrières pensées non déguisées de critiques ouvertes des dérives sociales, politiques, raciales américaines. Jean-David Morvan livre un travail à la hauteur du plaisir qu’il a pris semble-t-il à se plonger dans l’univers tourmenté de Vernon Sullivan. Ignacio Noé (Douce, tiède et parfumée) excelle dans le croquis d’une Amérique body-buildée des années 50.
A Santa-Monica le corps est roi, la beauté et les muscles. Rock a juré qu’il ne ferait pas l’amour avant ses 20 ans. Il est beau comme un dieu et toutes les filles en rêve. Mais il a eu quelque ennuis sur lesquels il a besoin de revenir. Mona le convoite mais rien n’y fait. Idem pour Sunday Love, starlette et copine de Douglas. Rock a décidé de rester vierge. A la sortie de la boite de nuit, il est assommé et se retrouve au réveil nu dans un lit avec une blonde qui ne veut que lui. Assommé une seconde fois, on lui fait un prélèvement de sperme. Rock se réveille dans le désert en compagnie d’un chauffeur de taxi qui lui laisse sa carte. De retour au club, il tombe sur Sunday qui a découvert un cadavre dans une cabine téléphonique. C’est un truand, Petrossian, recherché par la police. Le corps est embarqué par les flics qui sont attaqués par des truands. Ils volent le cadavre. Rock et son copain journaliste Andy décident de se lancer dans une enquête pour démêler ce sac d’embrouilles.
Une Série Noire façon Carter Brown plus que Chase ou Cheyney. Avec un soupçon de San Antonio. Les dialogues sont décalés, le ton est souriant puis soudain passe au rouge sang. Vian y va fort avec un héros beau gosse à qui on ne la fait pas. Il forme avec le journaliste un duo classique, le privé et le gratte-papier. On flingue, on se prend des poings dans la tronche et des bagnoles de plein fouet, on découvre de mystérieux personnages. Et puis il y a les femmes, belles, mais dangereuses. Les souris ont la peau dure et on occulte pour le suspense la surprise du chef. Au sens propre du terme. De l’humour on l’a dit, une décontraction assez marrante. Vian délire et Sullivan signe. Docteur Folamour avant la date. Marrant.
Et on tuera tous les affreux, Glénat, 19,50 €
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