Madeleine, résistante, le tome 1, avait été un vrai phénomène d’édition. Madeleine Riffaud après la guerre qu’elle fait en première ligne chez les FTP, a combattu sur bien des fronts. Très engagée politiquement on la retrouvera en Algérie ou au Vietnam correspondante pour la presse communiste. Elle s’est confié à Jean-David Morvan pour coscénariser avec lui le récit d’une vie de combat. Le tome 2 vient de sortir, L’Édredon Rouge. L’occasion de faire un point avec Morvan sur le parcours d’exception d’une femme rare qui ira au bout de ses idées et de ses engagements. On saluera aussi Dominique Bertail dont le dessin, le travail graphique est largement aussi la cause du succès de Madeleine. Propos recueillis par Jean-Laurent TRUC.
Avant tout Jean-David Morvan, comment va Madeleine ?
Elle a 98 ans mais elle est en forme.
Trois fascicules annonçant le tome 2 de Madeleine sont déjà parus.
Oui comme pour le tome 1. Le 3ème fascicule du tome 2 est sorti 25 août. A noter que le tome 3 sera publié le 23 aout 2024 pour ses 100 ans.
Que raconte le tome 2 ? On sera dans les débuts de son action dans la Résistance ?
Vraiment le quotidien d’un résistant. Comme dit Madeleine on décrit au jour le jour comment ça marchait dans un réseau. A Paris au moins, comment on se retrouvait, comment on écrivait des messages codés sur des tickets de métro pour que les Allemands ne comprennent pas en cas d’arrestation. C’est aussi la montée en puissance de Madeleine car comme dit le Chant des Partisans, un ami qui tombe un autre qui sort à ta place. Les amis tombent et elle prend des responsabilités. Elle devient FTP (Franc-Tireur Partisan) à la suite des membres de l’Affiche Rouge, résistants communiste.
Elle est très marquée politiquement jeune déjà ?
C’est compliqué. Elle a un père socialiste, un grand-père anarchiste. Comme elle dit quand on s’engageait dans la Résistance on allait où on voulait de nous. Les jeunes étaient plutôt de ce côté. Dans le tome 2 on reste sur les 120 pages dans l’action au jour le jour des résistants. On est avant la Libération de Paris, on finit le 23 juillet 1944. Un mois avant. J’aurais pu faite 80 pages de plus. L’album finit quand elle tue le soldat allemand et qu’elle est arrêtée.
Comment gère-t-elle ? Est-elle surprise par l’énorme succès de cet album ? La BD lui a donné une reconnaissance plus forte encore.
Contente avec par exemple des affiches dans le métro où on dit je ne suis pas une victime, je suis une résistante. C’est le message qu’elle voulait transmettre comme Aubrac le lui avait demandé. Continuer à témoigner alors qu’elle est bloquée chez elle et avec la BD elle le peut.
Comment son destin peut-il aujourd’hui motiver autant de lecteurs pas toujours au fait de ce qu’a été la Résistance ?
Il y a deux choses. D’abord c’est beau, ça concerne, le dessin de Bertail apporte beaucoup avec la teinte bleue de fond. Ensuite Madeleine a toujours intéressé les gens, grand reporter de guerre, et elle ne voulait pas que la France qu’elle avait défendue se comporte comme les nazis dans les colonies. Ou que la guerre du Vietnam était injuste. Ce qu’on a réussi c’est que la progression dans le premier tome impose le personnage. Cela se voit dans les ventes mais Madeleine a vendu un million d’exemplaires de son propre bouquin à l’époque.
Il y a aussi la notion de survivante ?
C’est une éternelle survivante. Elle a eu le Covid ce qui à son âge n’était pas évident, hospitalisée. Elle résiste, ne cesse jamais la lutte, avec une volonté de fer pour vivre. Une combattante, elle est résistante au-delà même de la Résistance.
Elle est unique.
Oui. Elle résiste sur tous les fronts, elle connait aussi par son passé de journaliste les origines des conflits d’aujourd’hui.
Elle a coscénarisé l’album, apporté ses idées alors qu’au départ la BD ne l’inspirait pas ?
Elle a compris la BD. Elle a un cerveau d’exception et ne vit pas dans un monde à l’arrêt. La BD est devenue son moyen d’expression. Elle se bat. Elle ne peut pas sortir de chez elle.
Il y a eu beaucoup de manifestations, d’expositions autour d’elle.
Et ça va augmenter. On a déjà l’expo au CHRD de Lyon et celle au château de Malbrouck. Bordeaux voudrait aussi faire quelque chose ainsi que le CML à Paris, Limoges. Madeleine a été très connue mais avait un peu disparu. Avec la BD elle revient et les gens se rappellent d’elle.
Elle est ressuscitée au sens souvenir, mémoire.
C’est tout à fait vrai et à un moment où elle avait besoin d’une nouvelle motivation que lui donne la BD. Elle est redevenue plus consensuelle.
Le but c’est d’aller au plus loin de sa vie ?
Il devrait y avoir sept albums et le sous-titre du tome 2 est L’édredon rouge. On comprendra pourquoi. Vu le succès, aller au 7 c’est acté avec Dupuis. C’est une femme très engagée dans la vie en général. C’est une femme d’action et une intellectuelle. A huit ans elle fait un poème remarquable et émouvant sur les Poilus de 14. Elle était une élève brillante.
On prend fait et cause, on plonge dans l’album sans difficultés et on fait partie presque de l’histoire, on est un témoin.
C’est ça. Au début le lecteur pense qu’elle parle au scénariste et très vite ils réalisent que c’est à eux qu’elle s’adresse. Souvent dans les BD historique d’aujourd’hui on est dans du Wikipédia sans intériorité. Avec Madeleine on continue souvent sa pensée, on se fond dans son style. On n’est pas dans une BD classique, il y l’attachement que l’on a pour elle. Elle a toujours su rester humble.
C’est une femme et elle a aussi dû s’imposer face aux hommes.
Oui et cela n’a pas été simple. Elle a dû là aussi se battre que ce soit pendant la Résistance ou après.
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