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Primo Levi, témoin et rescapé de l’horreur

Un témoignage essentiel, incontournable, celui de Primo Levi repris dans un album à son nom, celui des camps de la mort où il a été interné et d’où il il est revenu. C’est dans une école où Levi rencontre des élèves que l’on saisit dès le premières pages l’horreur de l’indicible, la mort systématique pour croyance religieuse. Primo Levi était chimiste, ce qui le sauvera. Il deviendra un écrivain reconnu avec entre autres Si c’est un homme dans lequel il traite de sa déportation à Auschwitz. Matteo Mastragostino et Alessandro Ranghiasci ont, avec ce premier roman graphique, su donner toute sa ferveur, sa passion au parcours d’un homme qui doit servir à ne jamais oublier et à refuser toute tentation révisionniste coupable.

Dans la classe où Primo Levi a été invité, il montre son bras tatoué d’un numéro, celui des camps de la mort, et dit sa passion des chiffres. Jamais il n’aurait pensé un jour en porter gravés sur sa peau jusqu’à sa mort. Un déporté juif ou résistant (ils ont été aussi tatoués) n’est plus qu’un numéro, sans nom, dans l’univers concentrationnaire de l’Allemagne nazie. En 1943 Primo Levi est secoué par son amie Vanda qui l’exhorte à rejoindre la résistance italienne. Levi se revoit, en bas des wagons dans lesquels ont embarque les Juifs à coup de crosse, destination inconnue, vers l’Est. Les enfants posent des questions au vieux monsieur qu’est Levi. Un camp est-il une prison ? Non, un camp, un « lager » est un endroit où les gens sont toujours malheureux et meurent dans leurs pyjamas rayés, le crâne rasé, sous les coups des SS. Levi devenu résistant sera dénoncé et livré aux Allemands comme juif. Il sera provisoirement épargné par son statut de chimiste dont les SS ont besoin dans leur laboratoire.

Même si d’autres BD ont été réalisées sur la vie de Primo Levi (Une Étoile tranquille), celle-ci a un excellent déroulé du récit qui alterne souvenirs de la vie concentrationnaire de Levi et dialogues avec les enfants qui sont des juges impartiaux et d’une logique froide. Levi a peur de ne pas être cru comme la plupart des déportés revenus qui se sont longtemps tus. Comment décrire ce qui est inconcevable pour un esprit humain civilisé et pourtant capable aussi du pire ? Les chambres à gaz avec les mères et leurs bébés dont les corps finiront aux crématoires. Les cadavres empilés que trouveront les Alliés à la libération des camps en 1945. Ne jamais dire « parlons d’autre chose, tout cela est bien loin », c’est ce que veut dire Levi. Le devoir de mémoire, c’est ce que l’on devra toujours aux millions de mort de l’Holocauste et de la déportation politique, homosexuels et tziganes. Un roman graphique essentiel en noir et blanc, au dessin émouvant, dur, tragique, pour aussi comprendre pour les plus jeunes qui ne pourront jamais comme leurs ainés rencontrer ces déportés survivants.

Primo Levi, Steinkis, 16 €

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