Il a laissé un nom qui collait à merveille à l’univers du rock, un rock déjanté, de mauvais garçons même si au fond de lui cela n’en était pas vraiment un. Vince Taylor, au début des années soixante, c’est la face sombre du rock. Elvis est gentil, les Beatles sont en passe de devenir des montres sacrés, Buddy Holly va se tuer. Arnaud Le Gouëfflec retrace le parcours d’un musicien inspiré qui a rencontré aussi d’autres démons en plus des siens, ceux qui l’ont exploité, en on fait une caricature bonne à remplir les tiroirs caisses. Son histoire est pathétique, à l’image des mythes qui se sont succédés, ont disparu sur les grandes scènes US ou d’Europe, France comprise. On retrouve avec grand plaisir le dessin de Marc Malès dont De Silence et de sang ou Les Révoltés restent de grands moments de BD.
Il est enfant pendant la guerre Brian Maurice Holden, et son frère est pilote de chasse dans la RAF. Il va vivre le Blitz et l’absence de son ainé prisonnier des Allemands. A la fin de la guerre, sa famille émigre aux USA et découvre en 56 Elvis Presley. Le Rock s’impose. Brian tente de devenir pilote, son rêve et s’écrase au sol. Il décide de se lancer dans la musique et prend le nom de Vince Taylor. Il rentre en Angleterre, endosse son harnachement en cuir. Il va marquer toute une génération. Il signera Brand New Cadillac. Il se forge le look de l’ange noir du rock. Sûr de lui, il est un solitaire qui brûle la vie par tous les bouts. Adulé par les fans, il triomphe. Cochran se tue en voiture. La vie de Taylor est un drame permanent. Il arrive en France, fais trembler l’Olympia, devient le mauvais garçon du rock et Piaf se jette dans les bras de ce nouveau jouvenceau. Ce sera ensuite Eddie Barclay, sans états d’âme qui l’engage, Pygmalion qui règne en maître et forge les vedettes. Il sent la bonne affaire. On l’oppose à Johnny. Comme quoi, il a eu tout faux le père Barclay pour une fois mais il ne faisait pas dans les bonnes œuvres.
C’est une saga triste que celle de Vince Taylor. Il n’avait peut-être pas le charisme ou la force de s’imposer, de jouer la carte de son talent, pris dans une machine infernale dont il était le jouet. Il va se détruire petit à petit sur déjà un psychisme fragile. Exploité sûrement, jeté quand il ne rapporte plus rien. Une dégringolade programmée et l’oubli même si son nom résonne encore à l’oreille de tous les amateurs de rock. Un hommage en forme de témoignage percutant.
Vince Taylor, L’Ange Noir, Glénat, 22 €
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