Les Misfits a été le dernier film terminé par Marilyn Monroe en 1960. Avec elle, Clark Gable, Montgomery Clift, Arthur Miller au scénario et époux en titre de Marilyn amoureuse de Montand, John Huston à la réalisation. On est au sommet de l’âge d’or du cinéma américain et, pourquoi pas, Luz le suggère, au début de sa fin. Avec Hollywood Menteur, Luz certes revient dans le moindre détail sur le tournage, sur ces noms mythiques aux profils délabrés, sur un film qui ne marchera pas, sur ces morts qui se cachent et se dévoileront bientôt. Luz a écrit son album sur les bases de témoignages, les bouquins publiés. C’est un vrai journal de marche des Misfits titré en France Les Désaxés. Un roman graphique troublant, violent comme ce monde sans pitié qu’Hollywood avait créé et qui vit toujours, sorte de démon immortel qui se nourrit de ses propres enfants.
1966, à New York, Montgomery Clift refuse de voir à la TV The Misfits. Il est le dernier en vie du trio à l’affiche du film. Gable, Marilyn sont morts. En 1960, à Reno, ville de jeux et de désert, John Huston commence le tournage de The Misfits. Marilyn, coachée par Paula Strasberg, est une star capricieuse qui souffre psychologiquement, physiquement, comme Montgomery Clift qui n’arrive pas à se remettre d’un terrible accident de voiture qui l’a laissé sous le contrôle de la drogue, de l’angoisse de la mort. Avec James Dean qui lui est par contre décédé dans mes mêmes conditions, il se plonge dans des cauchemars abominables. Gable a débarqué bottes aux pieds, boit comme un trou et assène ses vérités de star d’une autre époque en racontant ses souvenirs de mythe du 7e art. Tout est en place pour que le drame déborde de l’écran. Sous les objectifs des caméras et des appareils photos de l’Agence Magnum.
Se plongeant dans les multiples écrits et témoignages sur le film de John Huston, Luz nous livre un album documenté sur l’un des plus grands films hollywoodien. Qui sera un flop avec sûrement des conséquences terribles moralement pour les acteurs. Arthur Miller passe son temps à réécrire son scénario alors que le budget explose. Le film est bâti autour de Marilyn qui est enceinte et ne sait pas comment accepter ou pas cette grossesse. Tous les ingrédients d’un drame sombre et vrai sont réunis. L’affiche est bien sûr somptueuse mais les coulisses du tournage noires et sans pitié. Luz décortique la machine hollywoodienne, machiste, qui méprise les femmes en a fait des poupées manipulées. Marilyn est perdue, Clift aussi et pourtant la magie va opérer sur leur jeu. Avec Luz, et aussi grâce à la postface de Virginie Despentes, on a une vision réaliste, pas édulcorée d’un monde hors normes qui, quoiqu’il en dise, ne verra pas sa fin en 1960. D’autres très grands titres et acteurs continueront à entretenir le mythe au moins un temps, de Lawrence d’Arabie aux Oiseaux, à La Grande Évasion. Mais, oui, un monde dont la folie, la cruauté n’est jamais exclue et où survivre est un défi permanent. Impressionnant.
Hollywood Menteur, Futuropolis, 19 €
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