On s’y prend à l’avance mais Noël ce n’est pas si loin même si on se croirait en août en cette fin octobre. Quatre beaux titres qui sortent et non des moindres, dans de belles livrées et qui dépassent le seul nom de leur héros. Lucky Luke revisité et avec lui le western touchera un vaste public amoureux, fan de l’un ou de l’autre. On en dira autant de Vaillante, remarquable bouquin autour de l’univers automobile créé par Graton qui aurait très pu être un fleuron de l’industrie française. Ensuite, un peu de nostalgie pour rendre hommage à un génie du 9e Art, Mœbius pour un Artbook, Arzak, dans la nouvelle collection Le Petit Panthéon qui lui est consacrée. On termine (provisoirement) par les coulisses d’Hergé. Là aussi on dépasse la thématique et l’homme. On s’intéresse à son temps, à ce qui l’a inspiré dans un nouvelle édition revue et corrigée. Des idées cadeaux et on se dépêche car ce ne sont pas de gros tirages.
Lucky Luke, mythes et réalités du Far West c’est chez Gallimard. Dans une interview ancienne Morris disait qu’il avait un brin édulcoré l’histoire du Far West, des bandits idiots comme les Dalton qui étaient en fait de vrais tueurs. Idem pour Billy the Kid à qui il avait quand même fait un visage de teigne. Alors où est la vérité ou les vérités dans cette BD mythique qui a vu le jour en 1946. Morris n’a jamais dessiné que le Far West avec la complicité de son ami Goscinny. Des planches, des inédits avec les bons toutes catégories. On retrouve le peintre incontournable Remington, Mark Twain, Buffalo Bill, show man mytho, et évidemment Sarah Bernhardt qui reste l’une des plus épiques, piquantes héroïnes de la série. Les femmes de l’Ouest il va y en avoir gentiment relookées par Morris dans les saloons où elles « travaillent » ou hors-la-loi une autre activité, ou encore comme Calamity Jane éclaireuse de l’armée US. Tout est passé au crible, illustré par des documents d’époque. On retrouve les albums de la saga avec Morris (indépassable) et ses successeurs. On n’oublie pas Jolly Jumper ni ces cow-boys à la pendaison facile et bien sûr (notre préféré) le juge Roy Bean. Ce bouquin collectif de 128 pages, dos toilé est à glisser absolument à côté des albums de Lucky Luke. Une galerie de portraits des héros divers (inspirés souvent par des acteurs ou célébrités) en belle conclusion.
Lucky Luke, Mythes et réalités du Far West, Gallimard, 30 €
Vaillante, une marque automobile française de Stéphane Barbé édité par La Martinière, c’est un hommage superbe au génie créatif de Jean Graton. Sans les Vaillante il n’y aurait pas eu de Michel ou de Jean-Pierre Vaillant. En 1957 Graton donne vie à son héros Michel rejeton d’une famille où l’univers autour de lui sera celui d’un constructeurs, que ce soir de routières ou de bolides de course. Et là le trait de Graton fait merveille car il est toujours crédible. C’est ça sa priorité, pas de concurrencer les ingénieurs de Renault, Simca ou autre Panhard. Donc Graton donne à Vaillant un bureau d’études, des prototypes, une usine et des revendeurs. Là où il fait fort c’est dans le design des autos. Il les met sur les routes de France et sur tous les grands circuits mondiaux. Vaillante Horizon, la Goodwood, dans le Défi des remparts on aura en quelque sorte le musée des Vaillante. La Grand Défi passera la frontière entre BD et réalité. Philippe Graton confirme que son père a toujours voulu dessiner des voitures mais ne se prenait pas pour un visionnaire. Toute la machine Vaillant pour créer de superbes voitures, Graton l’a mise en place. Au long des albums et de l’évolution du trait de Graton, les voitures suivent le train. Le bouquin de 256 pages et très richement illustré, documenté avec des extraits des albums. On a aussi aimé la rigueur des textes très abordables et la mise en page aérée. Un superbe travail qui fait date.
Vaillante, Une marque automobile française, Éditions de la Martinière / Michel Vaillant, 39,90 €
On y ajoute le dernier album de la série Michel Vaillant Légendes, l’Âme des pilotes T2 chez Graton. Denis Lapière et Vincent Dutreuil terminent ce diptyque dans la famille Vaillant père et frères en 1971 pour le Grand Prix de Monaco. Warson rejoint le team et une journaliste Francine aussi romancière célèbre vient faire des photos pour la Presse. Interview en prime mais Michel doit régler la voiture sous des trombes d’eau. Un homme blessé passe un coup de téléphone dans un bar. L’avenir des Vaillante va en dépendre. D’autant que le FBI US est aussi dans le coup. Et Steve semble bien connaître l’homme blessé. Polar, thriller, grand prix, les Vaillante et Michel sont embarqués sur tous les fronts. On revoit de la R12, de la Panhard avec une dose d’héroïne ambiguë qui va signer un bouquin sur la course. Un bon épisode bien mené.
Michel Vaillant, Légendes, Tome 2, L’âme des pilotes, Graton / Dupuis, 16,50 €
Arzak Artbook ouvre le bal du Petit Panthéon de Mœbius. Ce sont les Mœbius Production qui en sont le maître d’œuvre. Ce premier volume présente donc dans tout sa splendeur un héros à chapeau pointu dont Mœbius dit qu’il lui ressemble. De Métal Hurlant aux albums, on le redécouvre dans d’abord dans une préface et puis dans huit chapitres. Un simple dessin presque fait sur un coin de table sans idée préconçue, et voilà comment le destin a fait d’Arzak un héros de BD solitaire, qui médite et vole sur un ptérodactyle qui fait la gueule. On retrouve dans le livre qui fait 174 pages, couverture toilée des archives inédites, des extraits des BD mais sous des formes inattendues. L’image domine, quelques textes donnent des pistes et trace un portrait pour ainsi dire définitif d’Arzak. On reste scotché aux pages qui resplendissent du génie de Mœbius qui continue à marquer de son empreinte les nouvelles générations de lecteurs et d’auteurs. Guerrier solitaire, sage du désert, Arzak (une édition aux textes franco-anglais) est l’émanation même de Mœbius souvent interviewé. A suivre un focus sur le Major Grubert, Malvina aussi une partie de la clé de la vie du Major.
Le Petit Panthéon Mœbius, Tome 1, Arzak, Artbook, Mœbius production, 47 €
Les Coulisses d’Hergé de Patrick Mérand parait aux éditions 1000 Sabords. Enrichie, revue, des index nouveaux, on se balade de Tintin chez les Soviets aux Picaros, 23 albums au total parus de 1929 à 1976. Qui a donc inspiré à Hergé son Tintin ou au moins aurait-il fait quelque emprunts, de Saint-Ogan, Rabier ou pour les fans d’aviation à Géo Ham peintre de l’Air. Amusant mais finalement secondaire. Hergé attribuait la création de la ligne claire à Marcel Jeanjean (Sous les cocardes en 1919). En parcourant l’ouvrage on sait pourquoi Milou porte ce nom. Mérand dissèque les pages, les bulles. On part au Congo, les Dupond et Dupont qui apparaissent, Tintin porte le salacot, casque colonial en liège et toile. Cette fois encore les illustrations priment mais les textes sont travaillés, pointus. Pas de pause au fil chronologique des albums pour en extraire des pépites en Amérique ou au soleil des pyramides. On croise Monfreid avant Pratt et on part en Chine avec des Anglais à Shanghai avec la guerre sino-japonaise. Plein de détails, d’objets iconiques, de personnages parfois historiques. Des avions aussi et le château du Loc Ness. On en passe tant sont riches ces 264 pages. On prend un vif plaisir à les lire, les parcourir, découvrir des secrets que Patrick Mérand a mis à jour avec son brio habituel dans cette nouvelle édition.
Les Coulisses d’Hergé, Éditions 1000 Sabords, 29,90 €
Articles similaires