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Pendant ce temps à Fécamp, Catel, Blutch et Vivès étaient confinés

On pourra toujours dire que l’histoire se répète, que sortir un journal dessiné à trois du confinement acte 1 (mars à mai 2020) au moment où commence l’acte 2 fait partie de ces vrais hasards qui ont le goût amer du bis repetita (non) placent. Encore faudrait-il s’entendre sur le sens de placent. Bon on passe. A Fécamp en mars dernier, Catel Muller, Blutch et Bastien Vivès se confinent sur place en famille. D’où la sortie d’une sorte de journal de route écrit et dessiné par chacun d’eux, avec son style, son humour ou pas, ses envies, ses idées, ses pensées. Mais le trio expérimente, ne fait pas ce que l’on pourrait attendre de lui, innove, en un mot continue à créer avec talent et émotion. Le résultat est unique pour ce cahier Aire Libre avec en prime deux belles pages historiques, artistiques sur Fécamp, charmant port de mer normand.

José-Louis Bocquet ouvre le feu avec sa préface. On décide en mars de rester à Fécamp et on va se battre contre l’ennemi invisible. Vivès prend une amende, on demande des attestations. Ausweiss, s’il vous plait, mais bon, c’est comme ça. Bocquet pose la question à Blutch, « as-tu envie de dessiner ? ». Vital est la réponse. Idem pour Vivès et Catel. Les trois vont multiplier les expériences, collage, gouache, crayon. Catel tient le rythme du dessin quotidien, Vivès rêve de Romy et Blutch poétise sur la fin du monde.

Deux jours prévus pour les Blutch qui seront deux mois, la femme avec laquelle il vit devient l’essentiel qu’il dessine. Il revient à la plume, dégoûté du pinceau. Le dessin est son expression la plus intime. On le voit au fil de ses pages. Catel, ce sont des dessins datés, au jour le jour, un journal. En couleur après avoir travaillé sur ses crayonnés d’Alice Guy en noir et blanc. L’amende des Vivès sous sa fenêtre, la poissonnerie, la promenade quotidienne, le port. Bastien Vivès redécouvre Romy Schneider. Mais vit mal l’absence de liberté. Romy, Sautet, Piccoli, il copie puis crée. Les Choses de la vie, sa technique avec du réalisme, du volume, sur papier, de la gouache, Vivès se souvient de Corben. Superbe.

C’est avant tout franc, sincère, honnête et bourré de talent artistique. On est dans l’improvisation, la lute face à l’absurde qui tue. Et continue à le faire en ce mois de novembre. Où sont Catel, Blutch et Vivès ? Peu importe car on ne refait pas une histoire pareille. Uniques ces dessin et ce cahier à plusieurs mains qui contient 120 dessins et trois autres tirés à part signés. Un seul tirage à 2000 exemplaires pour cette imagination au pouvoir face à l’impossibilité de vivre libre. A avoir absolument.

Les Cahiers Aire Libre, Tome 5, Pendant ce temps à Fécamp…, Dupuis, 37 €

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