Le Siècle d’Eva de Bernard Yslaire restera comme l’une des œuvres les plus marquantes du neuvième art. L’intégrale que vient de publier Casterman permet de redécouvrir, de retrouver, de se laisser envahir par cette balade sans retour dans un siècle de violence et de haine. Mais sous la protection d’un ange gardien qui pourtant ne sourit jamais.
Un jeune homme est tué pendant la guerre de 14. C’est le point de départ du récit d’Eva Stern, psychanalyste qui reçoit depuis février 97 des messages, photos et textes, ceux d’un ange. Qui peut comprendre ce jeu de piste si il ne se plonge pas dans la chronique d’un siècle qui donnera aux hommes toutes les raisons de se haïr. Eva Stern est sur son lit d’hôpital. A 99 ans elle peut commencer à se poser des questions sur la vie et la mort, elle qui a connu l’horreur des camps.
Bernard Yslaire a composé une œuvre finalement assez philosophique au sens le plus noble du terme. La recherche perpétuelle non pas du bonheur mais du pourquoi de la vie, de la paix, du bonheur. Qui est l’ange, quels sont ces bugs qui parasitent les ordinateurs avec des messages incompréhensibles ? Eva veut comprendre. Yslaire donne des indices, ouvre des pistes.
Textes et dessin à dominantes foncées, rouge, bleu, accrochent œil et mémoire, replacent ce XXe siècle dans sa triste réalité. Et ouvrira sur un XXIe en forme de tours jumelles qui s’effondrent. Il faut se replonger dans l’univers d’Yslaire, à la fois poétique tel un Rimbaud et réaliste aux yeux ouverts sur un monde fou qui court à sa perte. L’album est conçu pour être lu tête-bêche.
Le Siècle d’Eva, Biographies d’un ange du XXe ciel, Casterman, 35 €
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