Ressortir du placard l’Affaire Markovic est une bonne idée car elle montre que même sous la tutelle patriarcale du Général de Gaulle, le pouvoir en 1968, après la débandade de mai, était un véritable obus non désamorcé quand on voulait le prendre même au sein de sa propre famille politique. Et donc boum, Georges Pompidou et son épouse Claude en seront cibles et victimes. En octobre 1968 le corps de Markovic est retrouvé dans une décharge. En se demandant même encore aujourd’hui si on en a tout dit, Jean-Yves Le Naour dont on connait la rigueur d’historien en est le scénariste objectif, Emmanuel Cassier est au dessin ce qui n’est pas si simple car la plupart des personnages sont des personnalités de tout milieu ayant vraiment existées de Delon à Couve de Murville ou Foccart, Chirac. Balade sans pitié au royaume du gaullisme en mal de nouveau calife.
Juin 1968 après la tempête on deale, on fait la fête et un certain Stefan Markovic a squatté l’appartement d’Alain Delon qui l’emploie. A Matignon Pompidou voudrait reprendre sa démission de Premier Ministre. Il a géré mai 68 mais c’est De Gaulle qui a en retiré le bénéfice après son voyage à Baden chez Massu pour s’assurer l’armée. Pas content Pompidou qui apprend que De Gaulle l’a remplacé par Couve de Murville, fidèle et ambitieux. Les Pompidou partent en vacances. Delon est interrogé par la police dans le cadre d’un rare kimono volé. Markovic est dans le coup. Un journaliste du Figaro s’accroche à Couve et veut tout savoir sur Pompidou écarté du pouvoir par les siens, De Gaulle en tête. Pompidou-Couve, la mangouste contre le cobra. Romy Schneider retrouve Delon pour tourner La Piscine. Markovic a peur et confie une lettre pour son frère à Belgrade. De Gaulle place ses pions, affaiblit l’image de Pompidou et verrait bien Couve un jour lui succéder. Et pour couronner le tout commence l’affaire Markovic.
Affaires de petits truands, implication dans des partouzes photos (truquées) à l’appui de Claude Pompidou, mort de Markovic qui aurait été un témoin gênant, rien ne sera épargnée et la presse, même sous partiel contrôle politique, s’en donne à cœur joie. Une affaire que l’on suivait en 1968, où chacun avait son idée sur le sujet. Déstabilisation, courage du couple Pompidou qui fait face, De Gaulle et la guerre des chefs, l’affaire Markovic n’est jamais passée en fait aux profs et pertes. Mise à l’écart et considérée comme une manipulation avec faux témoins et preuves truquées, elle n’a pas empêchée Pompidou d’être élu président. Sa mort en 1974 a privé le pays d’un homme qui aurait sûrement pu avoir une action déterminante sur l’avenir de la France. L’affaire Markovic dont on ne connait pas le meurtrier reste comme un des mauvais moments de la Ve République. Toute une époque. Services spéciaux étrangers, règlements de comptes, Marcantoni vrai truand, du tordu qui en fera l’affaire criminelle la plus lourde de l’après-guerre. L’album très bien construit se termine par un dossier complet sur le sujet de Jean-Yves Le Naour.
L’Affaire Markovic, Grand Angle, 18,90 €
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