C’est Julie Doucet qui est Grand Prix d’Angoulême 2022. Il y avait trois autrices en compétition dont Pénélope Bagieu et Catherine Meurisse. On dira qu’en choisissant Julie Doucet c’est une surprise mais aussi une reconnaissance de la BD d’influence francophone outre-Atlantique, au Québec, tête de pont du 9e art sur le continent américain face aux comics, du talent très particulier bien sûr de Julie Doucet et des autres auteurs canadiens. Après l’Américain Chris Ware en 2021 et le Français Emmanuel Guibert l’année précédente, la Canadienne Julie Doucet est donc élue Grand Prix de la 49e édition du Festival International de la Bande dessinée d’Angoulême, au terme d’un vote qui a réuni 1820 autrices et auteurs de bande dessinée.
Julie Doucet rejoint au palmarès d’Angoulême Florence Cestac et Rumiko Takahashi. C’est vrai qu’on est pris un peu au dépourvu avec Julie Doucet car Bagieu et Meurisse étaient favorites, méritaient amplement ce Grand Prix. A croire que les votants – le vote est accessible à tous les dessinateurs et dessinatrices référencés par un éditeur – ont choisi une certaine forme de renouveau moins classique en BD dans la lignée de certaines autres nominations qui avaient été plus intellectuellement politiques. En tout cas sans vrai lien direct avec le grand public au niveau du lectorat. A noter que cela fait 22 ans que Julie Doucet n’a plus fait de bande dessinée. Quand elle a publié son dernier Dirty Plotte en 1999, certaines et certains des artistes ayant voté cette année n’étaient pas nés. Cette situation n’est pas sans rappeler l’année 2014 qui avait vu le sacre de Bill Watterson, l’auteur de Calvin et Hobbes, qui avait cessé d’écrire 19 ans plus tôt mais qui lui était connu d’un vaste public à travers le monde.
La publication en 2021 par l’Association de l’anthologie Maxiplotte (en Sélection Patrimoine au Festival cette année) a permis à celles et ceux qui ne la connaissaient pas, de découvrir le travail subversif et radical de Julie Doucet.
Il faut rappeler que Julie Doucet, née en 1965 à Montréal, est l’une des autrices de bande dessinée les plus atypiques de la fin du siècle dernier. Après avoir étudié les arts plastiques au Cégep du Vieux Montréal au début des années 1980, elle s’inscrit à l’Université du Québec à Montréal, où elle complète un certificat en arts d’impression. Au cours de ses études, elle découvre la bande dessinée et commence à publier un fanzine photocopié : Dirty plotte, dans lequel elle documente en français et en anglais sa vie quotidienne, ses rêves, ses angoisses. Le titre est repris en 1991 par l’éditeur Drawn & Quarterly à Montréal qui les publie. Après avoir vécu à New-York, Seattle et Berlin, Julie Doucet est retournée à Montréal où elle vit et travaille, opérant désormais dans un champ plus proche des arts graphiques (collage, poésie, roman-photo). Ses travaux, qu’elle édite en tirage limité en sérigraphie, sont parfois publiés par Drawn & Quarterly. L’essayiste Anne-Elizabeth Moore a publié en 2018 une étude sur l’œuvre de Julie Doucet (Sweet Little Cunt: The Graphic Work of Julie Doucet), qu’elle perçoit comme précurseur d’un nouveau féminisme en bande dessinée.
Elue parce que c’est une femme et non pas au regard de son oeuvre (et pendant ce temps Rosinski ou Van Hamme n’ont rien) … Ca ne fait pas avancer la cause des femmes. Pathétique
👏👏👏👏