Avec Troisième Vague les éditions du Lombard ont misé à fond sur le thriller contemporain et musclé. Action, économie, un soupçon de magie, la collection s’enrichit depuis vingt ans de séries triées sur le volet. A noter que Desberg et Vrancken viennent de sortir H.Ell, une nouvelle série au Lombard sur laquelle nous reviendrons très vite. Rencontre avec Stephen Desberg (ce reportage a paru également dans le magazine ZOO, texte Jean-Laurent TRUC).
Succès à la clé, Stephen Desberg, à lui seul, signe les scénarios de sept séries dans l’univers de Troisième Vague. Dernière en date John Tiffany. Mais qu’est-ce-qui fait courir – et écrire – Stephen Desberg ? I.R.$., I.R.$. Team, I.R.$. All Watcher, Rafales, Sherman, Miss Octobre, John Tiffany, Desberg a fait partie de l’aventure Troisième Vague depuis le début. « Yves Sente voulait à l’époque créer un label pour une nouvelle génération, un écrin pour de nouveaux auteurs. Le thriller contemporain au sens large s’est imposé avec Koda, I.R.S., Alpha ou Vlad. Je me suis reconnu dans cette démarche ». Avec une collection ajoute Desberg « les lecteurs s’y retrouvent. Ils sont plus à l’aise ».
Pas faux dans la mesure où le travail éditorial offre une signalisation claire des ouvrages au sein même de la collection, un guide qu’apprécie le lecteur. « Ce qui ne voulait pas dire que la collection serait un fourre-tout, au contraire ». Avec I.R.$. Desberg a emprunté un chemin ouvert par Van Hamme et Largo Winch. « L’argent pouvait enfin être le thème d’un thriller avec le principe aussi du diptyque, deux albums pour raconter une histoire, un bon format ».
Les méandres du foot « pro » avec I.R.$. Team
Stephen Desberg est un fidèle du Lombard où il a « des amitiés éditoriales dans un esprit positif et, à chaque série depuis quinze ans, de bons retours de la diffusion ». Un pudique Desberg. Il a aussi à son palmarès Scorpion avec Marini chez Dargaud qui aurait pu faire partie au départ de l’aventure Troisième Vague. Pas de regrets, Desberg est passé à une déclinaison des aventures de son héros fétiche d’ I.R.$., Larry B. Max. Ce fan de foot, a embarqué Max dans des affaires dont le ballon rond est la vedette. « C’est un paradoxe pour le passionné que je suis de parler de corruption dans le foot, de magouilles. Je suis un amateur au premier degré », confirme Desberg qui avoue qu’il était plus facile d’écrire avec recul sur des « matchs arrangés, des transferts trafiqués, démonter les rouages avec I.R.$. Team qu’avec la série mère I.R.S. Elle ne se prêtait pas au sujet ».
Avec à la clé de très bonnes réactions de jeunes sportifs heureux qu’une BD parle enfin vrai sur le foot. « Le cyclisme aurait pu aussi m’inspirer ». Sans oublier que le côté glamour et people des stars du foot ajoute à l’impact d’I.R.$. Team en collant avec un quotidien souvent en vitrine dans les médias. Mais Desberg sait qu’il n’est pas simple de se servir de l’actualité : « Il y a toujours un déphasage entre le moment où on a l’idée et le dessin. Difficile de s’en inspirer. Quand un sujet me touche je me dis qu’il faut en parler. Je l’ai fait souvent avec I.R.$. comme l’utilisation par les Américains des milices privées en Irak. J’attaque ainsi un problème ancien qui ressort à la Une ».
Le retour au thriller avec John Tiffany
Pour sa nouvelle série dont le premier tome vient de sortir, John Tiffany, Desberg s’est fait « plaisir et bien amusé ». « Je me suis senti libre avec Tiffany, une envie de revenir au thriller. J’avais le scénario et pas le dessinateur. Panosian a été choisi. Cet Américain avait travaillé sur X-Men, Wolverine ou Kung Fu Panda Il est passionné de BD franco-belge. Il a su mélanger avec talent et efficacité ses influences ».
L’histoire de ce chasseur de primes qui se retrouve avec un contrat sur sa propre tête a du punch et de l’humour : « Ça swingue et Tiffany a été une expérience amusante que nous avons parsemé de clins d’œil avec Dan Panosian. Les fans de la série Mad Man comprendront en voyant Tiffany, un type qui est humain, bon dans son job et nul dans sa vie privée. La série est prévue en trois diptyques. Le personnage va évoluer. Un album devrait paraître tous les sept mois ». Avec Tiffany Desberg pose la question de la légalité, celle de tuer quelqu’un : « Le chasseur de primes, le soldat pendant la guerre, où s’arrête le droit de tuer, si droit il y a, et où commence le crime ? ».
Un autre cycle de Sherman avec Griffo
Stephen Desberg n’est pas un touche-à-tout. Il allie calme et réflexion du propos, passion pour son métier de scénariste, lui, l’Américain devenu Belge. « Difficile d’imposer des série sur le long terme, je reste prudent ». Côté goûts, il aime « beaucoup la science-fiction, la fantasy mais ce n’est pas facile à traiter. Je ne suis pas à l’aise non plus dans des gags en format court ». Si on lui demande quel est son bébé préféré ? « Piégé ! Je choisis Tiffany, le petit dernier et Sherman qui reviendra bientôt pour un autre cycle. Griffo est d’accord ».
Enfin dans quel genre Stephen Desberg n’aimerait pas se lancer : « Le Japon médiéval. Je ne suis pas bon dans ce domaine que je connais mal. Il faut du ressenti ». Pas de soucis, Stephen Desberg saura maîtriser toutes les nouvelles vagues comme il l’a toujours fait, en douceur souplesse, avec talent.
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