Michel Durand s’est lancé dans une aventure à plusieurs étages. Dans Ambre Gris (Glénat) il part à la chasse à la baleine au XIXe siècle. C’est aussi un défi personnel, une quête. Il en profite pour revisiter son dessin, écrire le scénario, s’interroger. Michel Durand, Montpelliérain d’adoption auteur de Cuervos, de Destins, connu aussi sous le pseudonyme de Durandur, avec tendresse et passion, sentimental inquiet, se découvre avec franchise et générosité pour Ligne Claire (Propos recueillis par J-L. TRUC)
Pourquoi vous être embarqué dans cette aventure baleinière hors normes ?
J’ai été touché par un bouquin généraliste sur les baleines. Elles m’ont impressionné par leur taille. L’illustration sur la façon de les découper comme une peau d’orange m’a marqué. Tout est démesuré et tout était utilisé dans la baleine. A tel point que sur les baleiniers ils faisaient frire la cervelle du cétacé, morceau de choix et récompense de l’équipage. Et puis, ce qui est rare chez moi, cet intérêt pour la baleine a duré, la thématique s’est imposée. Je me suis dit que je pouvais en faire une BD mais je n’avais pas d’histoire au départ, pas vraiment d’intrigue.
L’accouchement a été difficile ?
Les idées sont venues au fur et à mesure. Il fallait des conflits, mettre en place une ironie dramatique. C’est ce que nous lecteurs savons et que les personnages ne savent pas. Conflit sexuel, conflit de puissance, lâcheté, conflit intérieur, les mémoires de l’abbé Grégoire Levasseur racontent tout cela. Le capitaine Masquelier, la douce Jocelyn sa proie à bord, le prêtre qui est le père de la jeune femme et ne le lui dit pas, les personnages sont les traits d’union entre la chasse à la baleine et l’intrigue. C’était tout le problème. Il fallait que je fasse passer mon émotion, que l’on ressente mon urgence, celle du dessinateur, de l’auteur que je suis.
Un méchant, un gentil ? Qui sont vraiment le capitaine et l’abbé ?
Le capitaine est le vrai méchant dont on attend la fin avec impatience. Elle devra être terrible. Mais le capitaine Masquelier c’est aussi le pivot de l’histoire. Meilleur chasseur, il est le symbole de la productivité à outrance, de la course folle du baleinier à la rentabilité sur fond de capitalisme naissant. L’appât du gain explique aussi sa violence que je mets en avant. Le curé, l’abbé, ce n’est pas vraiment un gentil. Il est le narrateur et on verra dans le second tome qu’il a écrit ses mémoires. L’abbé crée un désordre par lâcheté. On voit son sentiment de culpabilité même s’il rejette ses faiblesses. Il n’avoue pas à sa fille Jocelyn, la vraie victime de la cruauté et de la folie du capitaine, qu’il est son père. Il le fera trop tard.
Vous invitez aussi Melville à bord du baleinier.
Volontairement. Je n’avais pas lu Moby Dick de Melville. Je pensais que son roman ne parlait que de chasse à la baleine, pas de découpage. En fait je me dédouane d’avoir marché sur les traces de Melville en faisant un personnage. C’est un clin d’œil. Fiction ou réalité ? Il ne faut pas confondre. Melville était un vrai aventurier. J’ai fait une mise en abyme, transpose une œuvre dans une autre œuvre. Et puis c’est à Melville que l’abbé apportera ses mémoires dont je parlais plus haut. Alors…
Votre dessin s’est transformé dans cet album.
J’ai adopté un nouveau style. Je voulais casser mon dessin réaliste, académique. Blain m’a inspiré, Bofa l’illustrateur aussi. Je change de dessin en permanence. Tout en gardant une cohérence. J’ai accentué les arrondis. On a des tics dans le réalisme. Il faut les contrôler, chaque case se travaille, la forme des yeux, des bouches, du nez pour ne pas toujours refaire le même. Je me surprends. Mes images sont encore plus belles.
Ambre Gris sera en deux tomes ? Et ensuite ?
Oui et le second dont je vais vous montrer des planches (voir le diaporama )sortira rapidement. Glénat a cru dans cette aventure. Après j’ai envie de travailler sur un projet qui montre la souffrance animale, travailler dans une certaine continuité car j’ai beaucoup aimé dessiner la mer. Projets aussi de scénarios écrits par d’autres mais à suivre.
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