L’Épervier et de retour. Pour un troisième cycle qui enchaîne sur les quatre tomes de Plume au vent, André Juillard et Patrick Cothias relancent, sous le titre Les Sept vies de l’Épervier, les aventures d’Ariane de Troïl. Quinze ans après, c’est le titre de ce nouvel album qui paraîtra le 10 janvier prochain chez Dargaud. André Juillard a reçu Ligne Claire pour une rencontre sur ce retour très attendu. (Propos recueillis par Jean-Laurent TRUC).
André Juillard, quand nous nous étions vus il y a un an vous travailliez déjà sur Les Sept Vies de l’Épervier ?
Oui. J’ai un peu traîné au début. Nous avions une vraie envie commune pour cette reprise avec Patrick Cothias qui ne demandait que ça. Je n’avais pas écarté l’idée mais j’étais très pris par Blake et Mortimer, Lena ou Mezek. J’y pensais de temps en temps et voulais effectivement retrouver ces personnages.
Vous aviez abandonné vos héros à la fin du tome 4 de Plume au vent, Ni Dieu, ni diable. Ils venaient de revenir en France après leur escapade aux Amériques. L’album a paru en 2002. Ils ont vieilli ? Apparemment bien quand on regarde Ariane toujours aussi belle.
Pas trop en effet. C’est assez difficile de faire vieillir une femme. J’ai du mal graphiquement. J’ai essayé. Les hommes c’est beaucoup plus simple. Et puis il y a une vieille idée de Patrick qui pourrait amener Ariane jusqu’à Louis XVI mais c’est une autre histoire. Mais (rires) ils mènent une vie saine, en plein air. Cela conserve.
Ariane, dans Quinze ans après, veut retrouver comme elle dit « les graines qu’elle a semées ». Mais le parcours va être difficile.
La première mouture du scénario était un peu sage. On ne tremblait jamais vraiment pour les personnages. Patrick a parfaitement musclé finalement l’histoire. Il n’y avait pas de vrais méchants sauf Gaston d »Orléans, le frère du roi mais qui était trop impliqué dans la grande Histoire pour pouvoir s’en servir pleinement. Donc, il fallait un sale type et c’est le vicomte de Roquefeuille qui a un compte à régler avec Ariane. Il a une motivation forte, la vengeance.
Il fallait un épisode marquant ?
Tout à fait. Stevenson l’a écrit. Dans un roman l’apogée est atteinte au moment de la scène marquante. On s’y est mis ensemble avec Patrick. J’ai suggéré quelques pistes. Le lecteur doit avoir de l’empathie avec les personnages même ceux qui on des défauts. On doit s’y attacher. On a plus de distance avec quelqu’un qui n’est que vertueux.
Vous avez mis la barre haut car, sans vouloir dévoiler l’action qui monte graduellement en puissance, Ariane va cruellement souffrir et puis il y a la certitude que finalement elle est bien mère ?
Patrick Cothias avait déjà ouvert la voie dans son Ninon secrète. Ninon de Lenclos serait la fille d’Ariane et dans Quinze ans après elle est une jeune fille qui a été adoptée. N’oublions pas qu’Ariane aurait eu aussi un enfant avec le roi Louis XIII. Mais c’est pour le prochain album avec un voyage dans le Midi de la France.
Et une idée sur l’identité de cet autre enfant ?
Un fils qu’elle va rechercher. Patrick a une idée issue d’une autre de ses œuvres. Cela dit, c’est difficile de gérer des personnages historiques, vous savez. J’ai besoin d’y croire. Prenez la piste des séries de Cothias. Pour Ninon de Lenclos on ne sait pas si on la suivra plus tard.
Vous retrouvez la France. Cela vous a changé des grands espaces canadiens ? Bien que le décor de Quinze ans après soit très enneigé.
J’ai été très content de retrouver l’Europe. Je me suis bien documenté sur les auberges, un peu imaginé Paris mais me suis beaucoup inspiré du Mans qui est un modèle encore bien conservé de ville du XVIIe siècle.
Autre clin d’œil, peut-être, après le titre Quinze ans après qui a un petit air de Dumas pour Vingt ans après, Ariane croise la route des Mousquetaires ?
Oui, ils ne font que passer mais cela nous a permis de mettre en valeur Beau qui est un personnage auquel je crois beaucoup. Il échange quelques mots avec Aramis. J’ai envie de faire de Beau, l’époux indien d’Ariane qu’elle aime vraiment, un homme des Lumières. Il arrive sans préjugés, d’une société différente. Ce sauvage comme on disait, ce qui n’a rien de péjoratif à l’époque, pourrait devenir un héros à part entière et faire un grand voyage en Europe.
Revenons à Ariane. Elle a sa garde rapprochée. Beau bien sûr, Germain, son père. Elle est une femme d’action, en a vu de toutes les couleurs mais reste une femme ?
Ariane a un état d’esprit de femme qui croit a des valeurs. Elle est entourée d’anciens soudards à une époque terrible, d’hommes sans pitié, de Germain à Condor. Sans parler de Roquefeuille. Elle est aussi une victime de ce mépris masculin.
Vous préparez une suite à Quinze après. Mais il y a aussi Blake et Mortimer ?
J’en ai encore deux à faire. Le premier se passera avant Le Secret de l’Espadon pendant la seconde guerre mondiale en 1944. Une histoire d’espionnage. On eu le déclic avec Yves Sente en visitant à Londres le War cabinet de Churchill.
Olrik sera de la partie ?
Oui car Yves Sente en relisant Jacobs et l’Espadon a constaté que Blake, Mortimer et Olrik se connaissaient déjà. Cela va être passionnant pour les spécialistes. On saura aussi pourquoi ils habitent à Park Lane.
Vous avez enfin publié un très beau porte-folio très personnel ?
J’ai dessiné dans un carnet que je vais vous montrer des dessins inspirés par le site antique d’Agrigente en Sicile. C’est un cadeau que j’ai fait à mon épouse. Alain Beaulet en a tiré un porte-folio que j’aime bien. Dernier point, j’exposerai en janvier à Paris à la Galerie 9e Art.
Articles similaires