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La Loterie, l’horreur ordinaire

Miles Hyman a adapté un texte d’une rare ambiguïté et pourtant devenu une référence littéraire. La Loterie démarre comme une scène banale dans la vie quotidienne d’un village pour finir en drame d’une rare noirceur, terrifiant dont les conséquences sont admises par tous. Shirley Jackson a signé le récit de cette cérémonie horrible qui peut dérouter, déranger mais qui ne laisse pas indifférent, oblige à chercher une correspondance ou une issue peut-être même pas soupçonnée par l’auteur. Miles Hyman en a fait une succession de tableaux très peu légendés dont chacun parle par le trait et l’ambiance, la couleur, le désespoir. Stephen King aurait pu écrire La Loterie.

On prépare la loterie annuelle dans ce petit village bien tranquille sous le soleil de juin. On est dans le Vermont ou le Maine dans les années quarante. La tradition remonte loin. Dans l’urne autant de bulletins que d’hommes chefs de famille. Ils sont tous là et les règles sont strictes. Un bulletin porte une tâche noire. L’homme qui l’aura impliquera dans un second tour l’avenir des siens. Car le rituel n’est pas celui d’une fête mais plutôt d’un sacrifice.

Il est compréhensible que La Loterie ait choqué et fait couler beaucoup d’encre. D’abord parce que l’action se situe aux États-Unis réputée démocratie intouchable sans que rien ne dise si c’est une invention ou si des faits réels ayant pu exister ont donné vie au sujet. Ensuite, le mot injustice est répété à maintes reprises sans que pour autant il change quelque chose. Sans dévoiler le suspense, mot peu adéquat, de la conclusion de La Loterie, c’est au lecteur de tenter de trouver une raison à ce meurtre rituel. On sent toute la tension qui règne dans chaque planche de Hyman dont la progression narrative est remarquable. Pas un sourire car tous ils savent. Il n’y a pas d’innocents même pas les enfants et c’est ce qui dérange le plus. On fait des rapprochements avec le nazisme, folie d’un quotidien devenu ordinaire, ou le racisme, la différence créée de toute pièce mais pourquoi ? Survivre ? Mais à quel prix.

La Loterie, Casterman, 23 €

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