C’est peut-être pour la BD l’exposition de l’année. Hugo Pratt est le héros d’un exposition sans précédent depuis sa disparition en 1995. Hugo Pratt – Lignes d’horizons, ce sera à Lyon, au Musée des Confluences, dans ce lieu magique, entre terre et fleuve, qui aurait sûrement séduit Pratt. L’exposition du 7 avril 2018 au 24 mars 2019. Un record déjà dans la durée et une première que cette confrontation dialoguée de l’œuvre du père de Corto Maltese avec son parcours à travers les continents, l’ethnographie, les objets qui illustrent son œuvre, autant de témoins matériels à l’appui de ses héros de papier.
En consacrant une exposition à Hugo Pratt (1927-1995), le musée des Confluences souhaitait rendre hommage à l’un des plus grands créateurs de bande dessinée en mettant en résonance son œuvre avec les cultures et les civilisations qui l’ont inspiré. Confronter ses créations, ses dessins ou illustrations à une centaine d’objets issus principalement des collections du musée et de quelques emprunts à d’autres grandes institutions. Des armes, bijoux, parures, vêtements, statues, c’est aussi prolonger son imaginaire, rencontrer ses sources d’inspiration et illustrer son goût de l’insolite et de l’improbable. « Nous avons développé l’idée d’une exposition où la planche dessinée, l’aquarelle, le détail d’une case retrouveraient l’objet, l’image, le récit ayant pu l’inspirer » confie Hélène Lafont-Couturier Directrice du musée des Confluences.
Le travail de recherches mené par le musée démontre qu’Hugo Pratt s’est souvent inspiré d’objets provenant de grands musées occidentaux et de leurs catalogues imprimés. L’exposition s’ouvre par le parcours biographique d’un artiste dont la vie se partagea entre l’Europe, l’Afrique et les Amériques. Créateur par ailleurs influencé par la bande dessinée américaine, la littérature d’aventures et le cinéma d’Hollywood, il avait le goût de la poésie, des oubliés de l’Histoire et des destins romantiques. Voyage immersif, l’exposition propose d’embarquer vers les territoires chers à Pratt, le Grand Océan (Océanie), les Amazonies, les Peuples du Soleil (Amérique précolombienne, île de Pâques), l’Afrique des Masques et guerriers, le temps des Indiens (d’Amérique), le Grand Nord (canadien). Pour chacune de ces régions du monde sont présentées des planches originales de son œuvre. Certains de ses dessins sont reproduits à très grande échelle : de gigantesques cases de bande dessinée d’où s’échappent les objets ethnographiques.
Il fallait aussi imaginer une scénographie qui soit un pont entre la planche de BD, l’œuvre de Pratt et l’illustration par l’objet. Elle a été réalisée par les équipes internes du musée. Leur travail s’est enrichi du regard de la graphiste Tiphaine Massari (c-album). Le choix d’une graphiste a été guidé par la volonté de faire du dessin l’élément structurant. Les vitrines se font cases de bande dessinée, aux montants noirs affirmés, qui dessinent des strips en trois dimensions. Au total 94 objets sont présentés dans l’exposition, 130 planches et aquarelles originales d’Hugo Pratt, plus de 50 reproductions de cases de bande dessinée de 3 à 7 m de hauteur, 390 portraits composent la galerie des personnages créés par Hugo Pratt, intégralement présentés au musée.
Hugo Pratt est né à Rimini le 15 juin 1927 de parents vénitiens et d’ascendance britannique par son père. En 1937, la famille rejoint l’Éthiopie récemment conquise par l’Italie où son père a obtenu un poste. Lorsque prend fin la domination italienne en 1942, le jeune Pratt est rapatrié à Venise avec sa mère l’année suivante. Doué pour le dessin, il souhaite en faire son métier. Il est alors recruté par un éditeur argentin de bandes-dessinées en 1949. Il s’installe à Buenos-Aires et y demeure une dizaine d’années. Le retour en Europe est celui d’un auteur à la notoriété croissante qui séjourne à Londres, en Italie et en France. En 1984, il s’installe en Suisse près de Lausanne, où il passera les dix dernières années de sa vie.
Un an pour avoir le plaisir et le privilège de découvrir Pratt sous un autre jour, un passionnée d’ethnologie et on pourra ainsi mieux apprécier ses récits, comprendre les liens secrets disséminés dans ses pages à travers les objets qui souvent appuient le récit. La vie de Pratt, ses influences dont un Milton Caniff, le cinéma avec Burt Lancaster qui lui inspire Corto, « Hugo Pratt – Lignes d’horizons » est à ne pas manquer.
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