Voila une collection qui met la main à la pâte et l’eau à la bouche si l’on peut dire et qui replace l’histoire de la cuisine dans celle de la grande Histoire. En fait on découvre, si on ne la savait déjà, que faire des bons petits plats correspond souvent aux mœurs d’une époque, aux apports de produits venus de loin ou disponibles, aux goûts des contemporains, à ceux des puissants qui ont les moyens et, cela on le sait moins, au bon vouloir d’une église qui se mêle aussi de cuisine au nom du divin. Dans les cuisines de l’Histoire commence sa saga culinaire au Moyen-Age, passe à la table du grandiose Louis XIV pour les deux premiers tomes, chaque fois sous forme de recueils d’histoires courtes, et se poursuivra au fil des siècles jusqu’au au nôtre, montrant ainsi que si il y a bien un art en perpétuel mouvement, découverte et invention, c’est bien celui d’accommoder les mets.
Au Moyen-Age finalement on mange bien, beaucoup, en particulier chez les seigneurs. Même si les moines se tirent la bourre côté restrictions et jeune. Le vin est apprécié d’où qu’il vienne et c’est le roi qui choisit, donne ses couronnes. Bon, c’est vrai que manger du poisson frais à Paris, il faut déjà l’envisager. Pourtant on y arrive. Taillevent sera l’un des grands cuisiniers de l’époque et annotera le fameux Viandier qui restera un monument culinaire très longtemps. Épices lointaines, les banquets aux règles bien précises de placement, les riches et les pauvres, il y a déjà au temps des chevaliers des dogmes, des inventions qui seront les bases de la cuisine de demain. Isabelle Bauthian a signé la recette, Natalie Nourigat en a assuré le menu illustré avec un joli trait ligne claire dans la veine d’un Jeanjean. Michel Tanguy, grand maître en la matière, a transcrit recettes et écrit le dossier sur la période concernée.
Dans les cuisines de l’Histoire, Tome 1, À la table des chevaliers, Le Lombard, 17,95 €
Sous le roi Soleil, la cuisine fait dans le grandiose et le politique. On va au Procope à Paris, un café qui a fait son apparition comme le croissant viennois. On y joue de l’esprit en dégustant un sorbet dont l’histoire remonte à l’Antiquité. La fourchette a fait son apparition même si elle ne plait pas au roi qui lui veut des légumes frais toutes l’année et fait construire à Versailles un potager qui doit se rire des saisons. La cuisine prend ses lettres de noblesse. On confit l’artichaut et l’asperge est la favorite de Louis XIV qui oblige ses courtisans à le regarder manger. Monarque absolu, la table du roi est la source de biens des déconvenues selon où on est placé. Et puis il y a le cuisinier Vatel qui de peur de ne pas réussir un banquet en faveur du roi donné par Condé se suicide parce que le poisson frais a du retard. Rutile tient le manuscrit du grand livre, Gaëlle Hersent l’enlumine et c’est toujours Michel Tanguy qui conclue avec recettes et historique.
Dans les cuisines de l’Histoire, Tome 2, À la table du roi Soleil, Le Lombard, 17,95 €
On savoure ces deux volumes riches en anecdotes et en fumets. On découvre ou redécouvre que la cuisine n’est pas qu’affaire de quelques noms largement médiatisés de nos jours. Il y a eu un avant, il y aura un après. Ils ne sont que des héritiers d’artistes qui leur ont transmis des bases, une histoire, une expérience qui leur ont permis d’adapter leur savoir et leur talent aux goûts du jour. Une collection drôle, fine en bouche et parfumée qui plaira à tous les épicuriens et aux simples amateurs de bonnes choses aussi.
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