Cela a été annoncé comme un évènement, avec grand messe de lancement et polémique prévisible. On a touché au mythe, aux joyaux de la couronne. Tintin au pays des Soviets, œuvre fondatrice d’Hergé, les premiers pas de la ligne claire, allait en voir de toutes les couleurs. C’est fait. L’album tiré à 300 000 exemplaires, histoire de ne pas louper le coche pour les ventes en cas d’une ruée fort possible, est donc sorti en librairies. Retour sur le bébé qui s’est fait une seconde jeunesse toute en couleur.
Et on redécouvre l’album, on le lit avec finalement un authentique plaisir comme si il venait de sortir dans une version originale qui aurait été dès le départ en couleur. Dire que le travail des coloristes a été celui de Bénédictins est une évidence. Plus de relief, de force, appuyant le trait, soulignant les détails, l’humour, la couleur a pris sa place, sans écraser le dessin. Le travail de Michel Bareau, directeur artistique de cette aventure est digne d’éloges. On s’aperçoit même mieux que Benjamin Rabier a influencé Hergé et que Marcel Jeanjean, dessinateur des avions de la guerre de 14 était reconnu par le père de Tintin comme un précurseur de la ligne claire.
Tintin au pays des Soviets en noir et blanc est le témoin survivant d’une époque révolue. Espérer toucher un nouveau lectorat qui sinon ne le lirait pas, passait par la couleur. La version en noir et blanc est toujours dans les rayons. Pour les nostalgiques et les gardiens du temple. La version couleur a gagné en lisibilité. Que le côté commercial ne soit pas à négliger est une autre histoire mais après tout compréhensible. Reste le fond, le communisme ennemi des démocraties en 1930 que Hergé attaque à grands traits. Tout a déjà été dit et finalement le destin de l’ex-URSS, son histoire et ses errements ne sont pas si éloignés de ce que Hergé, à charge, montrait dans son album en 1930. Et encore plus flagrants en couleur.
Tintin au pays des Soviets, Casterman-Moulinsart, 14,95 €
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