Il a été pilote dans l’Aéronavale, a volé sur Crusader puis fait de la voltige. Frédéric Zumbiehl est un pilote éprouvé qui vole toujours mais pour le plaisir, avec une passion toujours aussi forte pour l’aviation. Et rien de plus normal qu’il soit devenu un scénariste spécialisé talentueux qui signe des séries aussi prestigieuses que Buck Danny, Buck Danny Classic, Team Rafale et depuis peu Tanguy et Laverdure. Des classiques pour tous les fans. Mais si on connait bien le scénariste Zumbiehl il y aussi le romancier, l’auteur de thriller, qui vient de publier Ö. L’occasion de faire un point avec lui en toute liberté au Blue Pearl, l’agréable complexe de restauration bio qu’il vient d’ouvrir avec sa compagne à Baillargues dans l’Hérault. Une autre corde à son arc. On revient aussi sur ses séries et sa passion, le roman qui mélange à justes doses des thèmes aussi divers que l’action ou l’ésotérisme. Propos recueillis par Jean-Laurent TRUC.
Frédéric Zumbiehl, vous étiez tenté de revenir au roman. C’est fait avec Ö. Le scénario de BD est frustrant ?
Ma carrière a commencé par l’écriture de livres, des histoires de pilotes. Je me sens plus écrivain que scénariste.
Vous êtes plus à l’aise ?
Oui, on n’a pas de contraintes. On peut creuser, mettre du style à un roman. Sur des séries BD on doit en plus s’adapter au style originel pour les dialogues. C’est intéressant mais effectivement un peu frustrant. Ce qui est bien avec le thriller c’est que tous les sujets sont possibles. Je suis un gros lecteur et éclectique. Je peux passer du polar à la physique quantique qui sera en fait le thème de mon prochain roman.
Revenons justement à votre roman, Ö. C’est un thriller ?
On dépasse la cadre du simple thriller ?
Oui et mes projets futurs sont tous dans cette veine. Je m’intéresse beaucoup à la spiritualité. Je fais de la méditation aussi que j’ai travaillée. Il y a des études faites en prison montrant que la méditation pouvait changer le comportement des détenus.
Vous avez mixé romanesque, médiation et spiritualité. Pas évident. Comment on joue sur tous ces tableaux ?
Pour moi ce n’est pas difficile. J’ai un peu de tout ça en moi, la fiction, l’action et la spiritualité. Associer le tout me permet de faire passer un message au lecteur pour l’y faire venir alors qu’il n’y est pas préparé. Ö va apporter la solution mais je ne peux pas en dire plus. C’est le premier roman que je publie sur papier. J’avais écris auparavant Titans, un peu comme un scénario de film dont j’ai fait finalement un bouquin qui a failli être édité chez XO éditions. Du coup pour Ö c’est chez M+ Éditions. Avec Marc Duteil on avait monté une petite maison d’éditions de BD, Jet Stream sur Lyon. Je lui ai envoyé le livre et on s’est revu. On a monté cette fois M+ Éditions qui éditera des romans à thème ou ésotériques. Des bouquins qui font du bien. Le livre est sorti fin juin. On sera en librairie en automne et on attend la réponse d’un gros diffuseur.
On revient à la BD avec une actualité très chargée, Frédéric Zumbiehl. Vous êtes un scénariste multi taches aéronautique. Buck Danny Classic tome 5 vient de sortir avec Jean-Michel Arroyo au dessin. Le prochain album va boucler le diptyque et Lady X est revenue.
On est sur des rails, sur ce qu’on fait nos prédécesseurs. Les retours comme celui de Holden ou Lady X sont des clins d’œil. On approfondira un peu plus Lady X que l’on a déjà dans la série mère. Il y a une belle scène de combats aériens avec elle dans la suite de Rideau de fer.
Comment vous choisissez vos thèmes pour vos scénarios comme ces bombardiers dans Rideau de fer ?
On a des envies. Dès le départ pour le Classic j’avais eu l’idée de Rideau de fer mais l’éditeur nous a demandé de commencer par la guerre de Corée. Ensuite il fallait faire la seconde guerre mondiale dans le Pacifique. Ce n’est que pour le troisième où ils nous on dit carte blanche. Enfin je pouvais faire une histoire sur la guerre froide, à la John Le Carré. J’adore et mon co-scénariste Fred Marniquet aussi. Les années 60 sont mythiques. Le cahier des charges est simple et je pense qu’on a fait notre meilleure histoire. Sur le tome 6 Danny, Tumbler et Tuckson sont en RDA et il se passe plein de choses.
Vous vous partagez le travail avec Marniquet.
On a des réunions téléphoniques. On monte l’histoire et on fait une sorte de ping-pong. Quand on a figé l’histoire chacun développe sa partie. Je suis le spécialiste de la partie aérienne, lui des ambiances. C’est un fan de Lautner. On se complète bien. Le prochain diptyque sera écrit par Yann, vous le savez. On reviendra ensuite et on a le temps. Le 6 est fini. On aime bien relire et on quelques points à fignoler. On va améliorer des dialogues. On peut synthétiser parfois. Pour le prochain diptyque je suis encore plus fan des années cinquante que soixante. Et cela pourrait être le cadre de mon prochain diptyque Buck Danny, avec de l’espionnage. L’intrigue ce n’est pas compliqué. Il y avait beaucoup d’essais d’avions à cette époque et j’aimerais qu’on soit sur une base de tests en Californie. On va proposer cette idée et il faut que les ayants-droits soient d’accord. Philippe Charlier est très présent au départ de l’album. Il y a des sujets à éviter à cause de l’image de Buck Danny.
Danny Classic ce n’est pas une collection que l’on voit se rapprocher d’aujourd’hui. Tout se passe entre 1945 et 1960.
Oui, donc la Côte Ouest avec de belles voitures, des stars de cinéma, de jolies filles, ce serait parfait. J’avais fait AirBlues dans le style avec Arroyo.
Côté jolies filles, Buck Danny c’est léger.
C’est pour ça que dans les années cinquante j’avais envie de mettre une pin-up. Une star de cinéma peut-être. Ou une starlette avec Sonny fou amoureux. On en parlé avec Marniquet et il est d’accord. Pour les avions il y en avait des masses en test sur les bases et beaucoup de pilotes se tuaient sur des avions impossibles. L’histoire de l’aéronautique était très riche à l’époque.
La conquête de l’Espace, la Navette ?
Non c’est dépassé. La Navette spatiale oui mais c’est plus tard. Dans le projet Mercury il n’y a pas de pilote.
Oui et ce sera un triptyque. Gil Formosa est au dessin et je suis seul au scénario. Là on est très technique et je suis obligé de contacter des amis pilotes de Rafale ou de Mirage. Le lecteur exige une précision totale. Pour les dialogues j’ai été pilote aéro mais même. Il faut évoluer et se faire expliquer car c’est devenu très compliqué avec des missiles à enveloppes de tir, les contre-mesures électroniques. Heureusement qu’il y a internet. J’ai eu envie de partir cette fois sur un sujet différent avec moins de combats aériens. On ira en Antarctique où il y a une base russe. On a creusé à 4000 mètres de profondeur et on touche un lac souterrain dans lequel il y a des choses incroyables dont un virus mortel inconnu contre lequel il n’y a pas de remède. Et bien sûr il y a des méchants qui le volent. Je balade un peu mon lecteur et Lady X est au centre de l’affaire. Il va lui arriver des choses qu’on n’avait jamais vu. Danny prend aussi une dimension supplémentaire car il vit une petite histoire d’amour. De l’inédit.
Le titre de ce Buck Danny ?
Il y aussi dans votre production un nom incontournable, celui de Tanguy flanqué par l’excellent Laverdure.
On a repris la série avec Patrice Buendia au scénario et Sébastien Philippe au dessin. On est dans du contemporain mais il y a aussi une série Classic. Sébastien est très bon en dessin et un vrai sens de la mise en scène très cinématographique. Avec Patrice on essaye de faire des choses originales. On veut marquer le coup. Diamants de sable est sorti en juin, le prochain avant la fin de l’année. On a un cahier des charges et on nous a imposé le lieu, le terrorisme au Moyen Orient et l’avion, le Mirage 2000N parce qu’il va être réformé. C’est Alexandre Paringault éditeur qui a fait ce choix en fonction de ses liens avec l’armée de l’Air. Pour nous scénaristes cela a été compliqué. Un Mirage 2000N ne fait pas de combats et s’entraine à la guerre nucléaire. Ce qui de nos jours. Mais on a réussi le challenge.
Et Team Rafale, une autre de vos séries ?
Quatre séries d’aviation, un sacré boulot, non ?
J’ai un peu la frustration d’être catalogué. Dès que je veux sortir du genre aéro on me dit non. Des idées j’en ai à la pelle. De la SF refusée comme un projet post-apocalyptique, idem. D’où le roman, comme ça je me fais plaisir. Et en BD que de l’aéronautique. J’hésite aussi sur une histoire de chars et de fantastique en Pologne pendant la seconde guerre mondiale. On verra.
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