Fragments d’une vie en peintures, Danijel Zezelj a illustré quinze lettres de Vincent Van Gogh. On ne parlera pas de BD pour ce grand format qui aurait être un porte-folio mais d’essai à la fois graphique, voire psychanalytique, une transcription bilatérale du texte vers l’image, la peinture et, pourquoi pas, aux connotations inévitablement biographiques. Blanc, noir, de Londres en 1873 à juillet 1890 où il meurt, on suit un parcours douloureux, un génie créatif dont la raison vacille mais n’est-elle pas justement, par son état, la cause de son talent incroyable ? Il faut se laisser aller, regarder, lire, surtout ne pas interpréter, se laisser porter par cet ouvrage mystique et magique au format de 262 par 370 mm, ce qui n’est pas neutre pour son inévitable impact.
Il écrit Vincent Van Gogh, beaucoup, à ses proches. Il se livre, s’ouvre, vit comme il le peut, s’enthousiasme. De Londres, Ramgsgate où il enseigne dans un internat et s’émerveille de voir la mer, il passe ensuite aux moulins de Hollande aux terrils et à la mine qui tue. Chaotique son chemin ? Pas si évident, il se sait capable d’actes irréfléchis, le dit à son frère. En cage il est dans sa tête et en souffre terriblement. Peut-il aimer ? Il déclare que le blanc et le noir sont neutres, multiples comme ceux de Velazquez.
Des planches qui éclatent de souffrances, de doutes et de beauté soutenues par les lettres en vis à vis, Danijel Zezelj est un artiste hors normes qui utilise le découpage, les cases, des fenêtres ouvertes pour mieux déceler failles et grandeurs du peintre. Son travail est inspiré, se plie à l’esprit d’un Van Gogh qui fléchit, repart, se rendort. On y ajoute une tristesse évidente dans un monde qui n’appartient plus qu’à Van Gogh mais que Danijel Zezelj a réussit à entrevoir, qu’il interprète et rend lisible. Un hommage mais surtout un témoignage, un constat clinique d’une force et d’une beauté spirituelle à couper le souffle.
Van Gogh, Fragments d’une vie en peintures, Glénat, 22 €
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