Prix

Fauve d’Or 2023 du Festival d’Angoulême à La Couleur des choses

Dire qu’on s’y attendait est un doux euphémisme. Il suffisait de lire la sélection officielle. Les Prix de l’édition 2023 du Festival d’Angoulême sont dans la lignée d’une rupture presque consommée entre les goûts du grand public et ceux d’un jury d’esthètes branchés qui écarte d’un revers de main la BD populaire. C’est désormais une habitude et donc La Couleur des choses de Martin Panchaud a le Fauve d’Or, Animan d’Anouk Ricard le prix spécial du jury et Naphtaline de Sole Otero le prix du public France Télévisions. Non que ces titres n’aient pas d’évidentes qualités mais sûrement pas celle d’avoir été plébiscités par les lecteurs. On n’en finit pas de rebattre les cartes dans un marché qui est en pleine évolution si ce n’est révolution.

On va dire qu’heureusement il y a eu un Fauve Jeunesse pour le très bon La Longue marche des dindes. Adieu Quai d’Orsay, Chroniques de Jérusalem ou Come prima. Pas de Rochette, Blutch ou de Hoka Hey ! primé par les libraires. Idem pour les gros éditeurs. Place aux outsiders, c’est tendance. Reste alors à savoir à quoi sert un Fauve, quel est son impact. A faire découvrir un titre, un auteur, à doper ses ventes, récompenser un talent ou un courant élitiste, une reconnaissance ? On est dans l’actualité la plus torride avec ce débat. Pour le Fauve Polar SNCF, c’est Hound Dog de Nicolas Pegon (Éditions Denoël Graphic) qui l’emporte. Là on dit par contre bravo. On avait vraiment aimé comme (finalement il ne faut pas jeter le bébé avec l’eau du bain), le Fauve spécial du Grand jury jeunesse attribué au Lombard pour  Toutes les princesses meurent après minuit, de Quentin Zuttion. Un sommet de délicatesse et d’amour, de tendresse. Le Fauve Prix de la série va à Les Liens du sang T11 de Shuzo Oshimi aux éditions Ki-oon. Normal par contre que le manga qui représente plus de la moitié des ventes BD en France soit mis en avant. Des prix exceptionnels ont également été décernés. Un Fauve Spécial de la 50e édition a été décerné à Hajime Isayama, et les mangakas Junji Itō et Ryōichi Ikegami ont été récompensés par des Fauves d’honneur. A lire sur Ligne Claire le 31 janvier : Marché de la BD, la charge irrésistible du manga.

Autre satisfaction quand même, le Fauve Prix du Patrimoine. Ce prix met à l’honneur une œuvre appartenant à l’histoire mondiale du 9e art, ainsi que le travail éditorial ayant permis de la redécouvrir. Il va à Fleurs de Pierre Revival de Hisashi Sakaguchi. On avait annoncé puis chroniqué cette réédition d’un classique du manga qui prend pour cadre la Yougoslavie de 1941 livrée aux massacres nazies, et dont les héros sont deux enfants en butte aux horreurs de la guerre. Une édition intégrale en cinq volumes agrémentée d’une nouvelle traduction. Allez, on ferme le sujet mais on y reviendra.

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