Avec ce tome 2 d’Algérie, une guerre française on rentre en plein dans le vif du sujet. Après la Toussaint rouge, les « évènements » comme on les appelle vont prendre une tournure qui ira crescendo vers une guerre totale, de terrorisme, de guérilla et de contre-guérilla, de torture, d’assassinats. Guerre civile et guerre de libération, d’indépendance, guerre tout court, l’Algérie entre en 1955 dans une logique implacable, sans vraie solution de repli. L’armée déploie ses régiments de professionnels. Philippe Richelle, l’un des plus fiables scénaristes d’albums historiques, continue son œuvre sur le dessin de Alfio Buscaglia. On suit pas à pas les grands et petits faits qui vont ensanglanter ces départements français loin d’une métropole qui pour l’instant ne se sent pas vraiment concernée. Les appelés ne sont pas encore envoyés en masse mais on est à un tournant, un point de non retour.
Dans les Aurès l’ALN se cache. A Paris, Paul, Mylène et André parlent de l’Algérie et du poids des gros colons sur l’Assemblée Nationale. Mendès est parti. A Alger on ironise, certains que jamais Paris ne pourra abandonner l’Algérie. Soustelle est nommé à Alger pendant que les paras français crapahutent dans les Aurés. Le capitaine Avranches recrute Loulou dans son service de renseignement. L’état d’urgence est décrété en Algérie. On rafle et on commence à torturer à la gégène. A Philippeville, on sait que le FLN et l’ALN prépare une offensive sur la ville. Le 20 août 1955 des centaines de partisans du FLN souvent armés attaquent les colons et les troupes françaises. Idem à El Halia où des massacres d’Européens ont lieu. La répression va être terrible et inévitable. Mais va jouer en faveur de la mobilisation musulmane.
A travers les personnages finalement anonymes ou au moins perdus dans la masse mais qui ont pu exister, Richelle ne refait pas la guerre, il l’illustre, la décortique, en dégage les causes, les conséquences, les moments forts. Il y aura les attentats que ce soit dans la Casbah où dans les bars d’Alger, les poseuses de bombes, le FLN qui rackette, les tensions au sein même du FLN, les colons qui ferment les yeux. On en est à un point de non retour. L’armée rentre d’Indochine, des professionnels aguerris qui ont compris ce qu’était le communisme dans les camps viets. En prime, l’Algérie c’est la France, des départements au même titre que les Côtes du Nord ou le Gard. Il y aura cependant la volonté d’une poignée de colons de donner les mêmes droits à tous leurs employés. Mais trop tard. Le dessin est précis, un peu trop « moderne » par moment mais rend bien quand même l’ambiance de l’époque. Rien à dire. Vont arriver Suez et la Bataille d’Alger, un autre tournant d’une guerre sans nom qui va voir l’armée prendre la main sur la police.
Algérie, Une guerre française, Tome 2, L’escalade fatale, Glénat, 14,50 €
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