Enki Bilal a, provisoirement, bouclé la boucle, celle du Coup de sang, la grosse colère de la nature qui commençait à en avoir ras le bol que les humains la martyrisent. Avec la Couleur de l’air, Bilal apporte un troisième et denier volet à sa trilogie. Animal’Z, Julia et Roem, la fable se termine après une fuite éperdue vers un terre promise où les couleurs vont enfin réapparaître et les mémoires s’effacer, le tout avec humour et tendresse pour ce genre humain qui avait bien mérité ce sévère et tragique avertissement. Magistral.
Un Zeppelin en perdition bombe volante sur laquelle une poignée de survivants du Coup de sang espèrent encore, un Zeppelin surnommé poubelle, le couple maritime d’Animal’Z qui enfin arrive à bon port dans une villa qui flotte aux vents, le trio de Julia et Roem qui suit un petit nuage en forme de flèche, tous vont finir par se rencontrer malgré un tueur cavalier anthropophage qui a accroché Ana et Lester à une selle. Le bout de la route sur terre et dans le ciel ne vont plus faire qu’un. Les cartes terrestres ont changé depuis le coup de sang qui fait la guerre à la guerre. Un beau bilan de morts violentes pour les humains en un seul siècle. La Terre dit stop. Aux survivants de faire le reste avec effacement généralisé des mémoires, reset pour tous pour repartir d’un nouveau pied, associés pour s’aimer sans se détruire, sans défigurer la nature.
C’est bien une fable, un conte avec une joli pied de nez final, avec une vraie tendresse et espoir dans le discours pour notre avenir. Qui a dit qu’Enki Bilal est un chevalier de l’apocalypse ? Faux, on le sait quand on a la chance de le connaître, de le rencontrer. Il a, il est le seul, remis en perspective le travail d’auteur de BD ou d’artiste. Il a le talent, qu’on lui envie, une vision positive de ce que sera le futur. Artiste moderne, peintre, créateur d’ambiances, de récits, conteur, cinéaste, Enki Bilal signe une fin souriante à sa trilogie. Cela doit en embêter plus d’un, de ces esprits chagrins méprisants et sectaires qui règnent souvent en maîtres sur le 9e art.
La Couleur de l’air, Casterman, 18 €
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