Autant le nom de Le Corbusier est connu du grand public en France, autant celui de Eileen Gray ne l’est pas vraiment. On va pourtant découvrir que leurs destins respectifs se recoupent comme le montre Charlotte Malterre-Barthes, architecte, pour le scénario et Zosia Dzierżawska pour le dessin dans l’album Une maison dans le soleil qu’ils lui ont consacré. Une grande et atypique architecte des lieux, créatrice d’objets design, incomprise et oubliée longtemps mais dont le talent et les œuvres dont la célèbre villa E-1027 sur la Côte d’Azur sont remises en lumière à juste titre.
En 1965, Le Corbusier se noie devant la villa qu’il habite à Roquebrune. Cinquante ans plus tôt Eileen Gray s’y réveille en compagnie de celui pour qui et avec qui elle l’a conçue, son amant l’architecte Jean Badovici. Eileen se souvient de son enfance irlandaise en 1888, du départ de son père. Eileen a été passionnée par la laque de Chine, comment l’appliquer, la fabriquer. Elle va apprendre le laquage, s’en servira au moment de l’Art Déco et découvre peu à peu ce qu’elle appellera la pauvreté de l’architecture moderne qui manque de sensualité. Elle n’est pas d’accord avec Le Corbusier qui pense qu’une maison n’est qu’une machine à habiter. Il faut faire appel aux sens, dit-elle, à travers l’architecture, le mobilier, les textures. Elle ouvre sa propre galerie-boutique, Jean Désert. En 1924 ce sera son grand œuvre sur un terrain sublime à Roquebrune, elle construit avec Badovici la villa E-1027, somme de ses envies et de ses rêves.
Le bel amour tournera mal. Le couple explose. Badovici se laisse convaincre par Le Corbusier qui barbouille les murs de la villa de fresques après le départ d’Eileen. sans compter que Le Corbusier ne démentira jamais les rumeurs selon lesquelles la villa est son œuvre à lui. Une trahison en fait. Eileen bâtira d’autres villas plus ou moins expérimentales mais toujours inspirées. On la reconnaît aujourd’hui, tardivement. L’album sur un dessin doux et clair explique celle qu’elle a été, une découverte souvent mais qui méritait de l’être.
Eileen Gray, Une maison sous le soleil, Dargaud, 19,99 €
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