On pourrait penser que la vie de Lincoln se résume en trois points. Guerre de Sécession et abolition de l’esclavage, assassinat dans sa loge au théâtre et statue assise à Washington. Déjà pas mal. Ce serait une erreur car réducteur. En lui consacrant un album dans la collection Ils ont fait l’Histoire, Fred Duval, Farid Ameur pour le texte et Roberto Meli au dessin le replacent non seulement dans son contexte mais aussi dans son humanité pleine et entière, à savoir ses doutes, ses combats, ses échecs. On est saisi par cet homme de grande taille, sévère, passé par des petits métiers, pragmatique aussi, devenu le symbole d’une Amérique de liberté. Que ce serait-passé si Lincoln avait échappé à la mort ? Aurait-il mieux reconstruit son pays ?
Gettysburg, 3 juillet 1863, le Sud perd la bataille et pratiquement la guerre contre l’Union. En novembre, Lincoln prépare un discours qui doit être celui de la victoire. Pas sûr car Lincoln se souvient de son enfance et de sa vie qu’il qualifie de banale. 1820 Abraham Lincoln passe son temps à lire et ne veut pas être fermier. Il assiste à une chasse à l’esclave. Il décide que sa vie sera celle d’un homme libre. Véritable force de la nature, Lincoln dirige des radeaux sur le fleuve toujours confronté à l’esclavage dans les états du Sud. Il participe aux guerres indiennes en 1832 et voudrait vivre en paix avec eux. Attiré par la politique il est élu député et devient avocat, criblé de dettes. Il devient célèbre et défend les plus faibles. En 1861 c’est la présidence des USA avec comme base de campagne la fin de l’esclavage. Le fossé se creuse entre le Nord industriel et le Sud où le coton est la seule ressource. La guerre couve et sept états sudistes refusent de le reconnaître. A Charleston un incident ouvre les hostilités.
Ce qui est passionnant dans cette vision certes appuyée sur des faits historiques, c’est la propre vision de son parcours par Lincoln face à son ami Ward qui revient point par point sur sa carrière. Il y a une vraie force dans la narration qui éclaire le personnage, le fait se découvrir, montre sa détermination, lance le chemin de fer entre Est et Ouest. Sa vie familiale est douloureuse. Il ira au bout de sa démarche et suspendra les libertés individuelles. On assiste à sa montée en puissance, « le gouvernement du peuple par le peuple pour le peuple ». Des mots finalement proches des révolutionnaires français de 89 dans un pays où tout déjà poussait vers un libéralisme à outrance. Il meurt en 1865. Lincoln reste une grande figure de l’histoire des États-Unis. Sa fin sera aussi un élément majeur, comme pour Kennedy, de cette notoriété. Le dessin est parfait, clair, réaliste, vivant et appuyé sur le caractère difficile à retranscrire de Lincoln quand on voit les photos d’époque qui illustrent le dossier historique final. Un album important et l’un des meilleurs de la collection.
Lincoln, Ils ont fait l’Histoire, Glénat Fayard, 14,50 €
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