Autant l’avouer. En lisant ce très pointu et complet album sur la naissance de la 2 CV Citroën, on a eu des frémissements de bonheur rétrospectifs et le souvenir d’une trouille colossale. La 2 CV a été un repère d’enfance, celle d’une grand-mère qui en avait une et dans laquelle elle trimbalait son jeune petit-fils, sans ceinture, à 70 km/h en faisant grincer les vitesses. D’où des hoquets frénétiques de la pauvre 2 CV qui a tenu cependant le choc et a été remplacée plus tard (ingrats) par la 4L. Trouille aussi parce que faire un tonneau en 2 CV, c’était paraît-il impossible. Faux. Entre Paris et Strasbourg où était l’école de journalisme, il y a Nancy, et un copain qui en avait une de 2 CV à l’aube des années 70. De nuit, bien tranquille allongée sur la banquette arrière, que faire si ce n’est dormir sereinement. Sauf que le conducteur s’est endormi, a ouvert les yeux au moment où il mordait le bas-côté. Coup de volant violent pour revenir sur la route et tonneau sur le toit, glissade pour s’arrêter à quelques mètres d’un camion à l’arrêt. Pas de gros bobos aux moins pour les deux humains qui avait servi de capote, la 2 CV, bien que solide, mine de rien, avait vécu.
On passe sur ces anecdotes, il y en a eu d’autres, nombreuses avec la 2 CV, même des sentimentales, et on en revient à sa saga. Dire que le travail d’enquête de Vincent Dugomier est remarquable, c’est banal. Un roman la création de la Deuch et le dessin superbement clair de Olivier Wozniak est parfaitement en phase. De quoi avoir presque envie d’en racheter une de 2 CV.
On part de loin en cette année 1923 à Clermont-Ferrand où réside Bibendum Michelin. Les patrons veulent savoir ce que les Français aimeraient comme véhicule à une époque où l’automobile bégaye encore. Pas d’auto pour le peuple. Les frères Michelin ont avec eux celui qui va devenir l’artisan de la future 2 CV, Pierre Boulanger. Toutes les marques françaises voudraient bien leur petit modèle populaire sans vraiment trop y croire. Les Michelin qui font des pneus sont renvoyés à leurs chères études. Mais les constructeurs sont têtus et chez Citroën ils ont un designer de génie, Bertoni, rejoint par un autre talent, André Lefebvre en 1933. La 11 CV qui deviendra mythique est dans les tuyaux. La Traction Avant va naître et Citroën passer sous contrôle de Michelin. On remet tout d’aplomb et retour à l’idée d’une petite voiture, pas chère, légère, simple, facile à réparer, une voiture minimum. Et là il faut découvrir quel va être le cahier des charges. Une vraie folie dont les essais feront de la casse jusqu’en 1937 où se dessine ce que sera finalement la 2 CV.
Mais ce n’est pas fini car la guerre approche. La suite, il faut la découvrir comme un roman d’aventures, avec ses rebondissements, ses coups tordus en particulier des occupants allemands, le cyclope première 2 CV à un phare. La 2 CV sort en 1948, plus de vingt ans après que l’idée en ait germé. Au début des années 90, la 2 CV finira sa longue et belle vie, trop polluante la laide et pourtant si belle petite voiture. Reste que pour des générations, elle a fait partie de la famille, une copine marrante, fidèle et qui ne rechignait jamais.
La Naissance de la 2 CV, Glénat, 13,90 €
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