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Severiano de Heredia, un destin hors du commun

Un Heredia peut en cacher un autre. Severiano de Heredia, critique littéraire, était le cousin du poète José Maria de Heredia. Et a été celui que l’on a surnommé avec ce goût douteux très français le Nègre de la République. Il est né en 1836 à Cuba, mulâtre qui s’exile de son pays natal et devient un des rois de la vie parisienne, journaliste mais aussi homme politique après la Commune, président du conseil municipal de Paris, député, ministre. Un cas dans notre grande Histoire et pour la petite Obama fera référence à lui dans son discours d’investiture. Isabelle Dethan au dessin (Gaspard et la malédiction du prince fantôme) et l’excellent Antoine Ozanam au scénario (Mauvaise réputation, Le Journal d’Anne Frank, Wilderness) ont tracé avec brio, tendresse et rigueur le portrait d’un honnête homme méconnu.

1844, Cuba, les esclaves et les mulâtres libres sont devenus la cible d’une conspiration politique. IL faut fuir et les Heredia décident de mettre leur jeune fils Severiano à l’abri en France en 1846. Devenu adulte il fait la fête devenu Séverin héritier d’une propriété familiale et brillant étudiant. Amoureux aussi, riche et métis ce qui ne lui a pas fait que des amis. Il se cherche et devient critique, journaliste à succès, est accroché par la politique. Sauf que son exploitation cubaine emploie toujours des esclaves. La guerre avec la Prusse arrive. Napoléon III est battu, Heredia part à la campagne avec sa famille. Retour à Paris où la Commune a sévi.

Esprit brillant et généreux, Heredia va trouver sa place dans une société pourtant peu ouvertes aux gens de couleur. Fortune et classe sociale seront plus forte que le racisme. Ce qui n’est pas non plus une référence mais une évidence. Heredia sera sur tous les fronts, politiques, sociaux et industriels. Il défendra le vote des femmes, la laïcité, précurseur étonnant, sincère. On notera sa réaction comme le montre Ozanam aux pavillons coloniaux de l’Exposition Universelle de 1889. Il sera cruellement touché par la mort de son fils qui se noie. Severiano de Heredia aura été un cas à part, à la fois modèle, haï, capable d’aller au bout de ses idées, courageux. Le redécouvrir est un (bel) hommage qu’on lui devait.

Severiano de Heredia, Élu de la République, Passés/Composés Biopic, 14,90 €

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