Canardo a bien du chagrin. Son papa, Benoît Sokal nous a quitté. Les Éditions Casterman ont appris avec tristesse la mort de Benoît Sokal, dont elles ont accompagné le parcours d’auteur depuis février 1978. Créateur de la série Canardo, cet amoureux de la nature avait contribué à l’aventure (À suivre) dès le premier numéro de la revue avec une fable écologique et caustique intitulée « Vie et mœurs du colibri géant ».
Maniant l’humour noir avec brio, Benoît Sokal a véritablement réinventé une forme de récit satirique adulte, influencé à ses débuts par l’ironie de la Série noire, la figure du détective privé (de Marlowe à Columbo), et la nervosité de l’encrage de Franquin. Par ses dialogues cyniques et ses personnages pittoresques, Canardo aura marqué l’entrée du catalogue Casterman dans l’âge adulte. Né en 1954 à Bruxelles, Benoît Sokal étudie la bande dessinée à l’Institut Saint-Luc, notamment aux côtés de son ami François Schuiten.
C’est d’ailleurs dans la revue de cette école, Le 9e Rêve, que ses premières histoires courtes paraissent. En plus des 25 aventures de Canardo publiées pendant quatre décennies, Sokal fait figure de pionnier dans plusieurs domaines liés aux nouvelles technologies. Il est par exemple l’un des premiers à expérimenter la mise en couleurs informatique, dès 1994.
À la veille de l’an 2000, comme Microids dont il a marqué l’histoire le précise dans son hommage à Benoît Sokal, ce véritable visionnaire et artiste exceptionnel, a œuvré pour le jeu vidéo avec la création, en 1999, de L’Amerzone : Le Testament de l’Explorateur. Sa patte artistique a façonné un univers inoubliable pour de nombreux joueurs à travers le monde. Cette expérience l’a amené à devenir pendant plusieurs années le directeur artistique de Microids. Benoît Sokal s’est également illustré par la création d’une franchise culte du jeu vidéo : Syberia (3 jeux, entre 2002 et 2017), puis Paradise (2006) et L’Ile noyée (2007). Il a réussi avec talent à transposer son amour pour l’Europe de l’Est et son Histoire en proposant des aventures singulières qui continuent de marquer les fans de son travail exceptionnel.
Reconnu pour son talent de créateur d’univers, il reçoit le titre de « personnalité de l’année » au Phénix Awards du jeu vidéo en 2002. En 2010, Benoît Sokal revient à la bande dessinée avec la trilogie Kraa (2010 à 2014), une grande fresque d’aventures aux influences chamaniques. Il n’aura pas eu le temps de réaliser l’un de ses derniers projets : dessiner entièrement seul, en couleur directe, une enquête de Canardo.
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