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Éclats, les temps mauvais

Erik de Graaf raconte le quotidien d’une époque où vivre si ce n’est survivre était loin d’être simple. Il ne parle pas des grandes opérations militaires, des chefs de guerre de la seconde guerre mondiale. Il parle de gens simples, de civils embarqués pour la plupart dans une aventure sanglante qu’ils n’avaient ou pas voulu voir arriver. Dans Éclats, ce sont les Pays-Bas vaincus et occupés qui en sont le théâtre éloigné finalement de celui de la France si ce n’est pas sa moindre superficie et les conditions d’une défaite qui allait couper en deux provisoirement l’hexagone ouvert, en prime, à une collaboration très efficace avec l’Allemagne. Le pays est occupé une seconde fois après 14-18. Les Juifs y furent tout autant persécutés, la répression sans pitié. De Graaf en évitant toute démonstration spectaculaire témoigne du destin d’une poignée de jeunes gens dont un couple Esther et Victor, après la guerre, qui vont se retrouver et témoigner simplement de leurs épreuves.

La tombe de Chris, un marrant, un copain de Victor, capable de tout pour semer la pagaille. En mai 40 Chris et Victor se sont retrouvés après une guerre perdue où ils n’ont rien pu faire. La reine de Hollande s’est réfugiée en Angleterre. On parle de sabotage. Et puis Chris est mort. Sur sa tombe Victor croise en 1946 Esther son ancienne petite amie. Les questions se bousculent. Que s’est-il passé pour l’un et l’autre ? C’est grâce à Chris qu’ils se sont connus en juin 1939. Victor reprend tout depuis le début de la mobilisation. Les Pays-Bas craignent que l’Allemagne ne respecte pas sa neutralité et celle de la Belgique. Victor et ses amis ne croyaient pas qu’ils feraient vraiment la guerre qui pourtant éclate et dévaste le pays.

Sur une mise en page très ouverte, un découpage aéré, précis, Erik De Graaf, d’un trait sobre, clair, fait parler des anonymes qui vont être à un moment ou à un autre avoir leur conscience en face d’eux. Comment Chris est-il mort ? Quand le quotidien peut-il devenir insupportable ? Quand ferme-t-on les yeux sur l’évidence ? Qu’elle est la bonne cause à l’échelle individuelle avec le risque d’une famille qui peut être détruite ? Il y a deux volumes à ce parcours qui pourrait paraître banal mais qui ne l’est en aucun cas. Sa spontanéité, son authenticité est celle des récits que l’on a pu entendre par des parents ou des grands-parents. Victor sera le fil rouge dont les actes seront la toile de fond du tome 2, Cicatrices. Un moment très fort en émotion simple, sans grandiloquence. Et un épisode de l’Histoire mal connu du public français.

Éclats/Cicatrices, Tome 1, Éclats, Champaka, 25 €

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