Des lingots, des diamants, pas du tout. C’est un héritage pour le moins atypique que va recevoir Manu. Son tonton gâteau lui a légué son stock de cierges. Il les fabriquait dans sa petite entreprise qui ne connaissait pas la crise. Le sacré ça marche toujours. Dans La Cire moderne (Casterman), Vincent Cuvellier embarque Manu, sa copine et son frère dans un road-movie spirituel. Dans tous les sens du terme, sous le crayon ligne claire de Max de Radiguès. De belles, sereines et divines surprises à la clé. Ce texte a aussi paru dans le numéro de janvier du mensuel ZOO.
Il n’a rien demandé Manu et il se retrouve avec des caisses de cierge en vrac et un combi Volkswagen rétro. Avec Sam, brunette délurée à cheveux courts, et Jordan au QI basique mais un sens inné du commerce, il récupère la liste des clients du tonton. Une dernière livraison pour si possible se faire du fric et aller buller au Maroc. Mais les voies du Seigneur sont parfois impénétrables.
Pour sa première BD, Vincent Cuvellier, qui vient du livre Jeunesse, a mélangé ses sources d’inspiration. « J’ai fait un rêve pour les cierges. Vraiment. On trouve des cierges et on en fait quoi. J’ai pensé que cela pouvait donner une histoire. Ensuite, je suis croyant. C’est venu un peu tout seul. J’ai fait une crise mystique plus jeune. Je suis parti marcher sur la route et je suis remonté à Brest où j’étais né ». Voila la surprise car au détour d’une livraison, le road-movie va se doubler d’une conversion au christianisme, en douceur. Manu ne voit pas la Vierge mais le fantôme d’un vieux curé. Dieu existe, Manu l’a rencontré. « C’est très compliqué de dire dans mon milieu qu’on est croyant. Cela n’a rien de péjoratif pourtant. La foi c’est personnel » pour Cuvellier.
De monastère en couvent ou églises, c’est de la comédie pure. Le trio fait la fête. On est dans Les Valseuses revisitées. Direction Lourdes, le summum pour écouler la marchandise sauf qu’il ne faut pas toucher au grisbi de l’Église. Manu continue à se poser des questions sur ce qu’il ressent et Sam comprend que son amoureux lui échappe. Même Jordan se range des voitures dans cette aventure qui a du fond et beaucoup de charme. Un sens certain de la narration, Cuvellier « a tout mis sur les personnages et les dialogues ».
Pas de cynisme dans ces cierges en goguette et qui en plus sentent les pieds. On retrouve des influences comme Davodeau, Rabaté, mais Cuvellier se distingue nettement par son propre talent. Pas de charge non plus pour ou contre, on peut évoquer librement le sujet de la conversion sans être coincé ou tordu, « parler de cul et de religion dans le même livre. Quand on écrit il faut lâcher prise et tout dire ». Enfin pas de projets BD à suivre même si occasionnellement ça l’intéresse, Cuvellier prépare un essai sur la littérature Jeunesse chez Gallimard et un recueil de 200 nouvelles. Sans oublier la boutique de livres d’occasion à Bruxelles, Les Gros Mots, qu’il ouvre en février.
La Cire moderne, Casterman, 158 pages noir et blanc, 16,95 €
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